Bonne élève
Datte: 23/05/2025,
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Auteur: Roy Suffer, Source: Revebebe
... trente-six semaines, chez moi ça fait en gros neuf cent heures contre mille six cent cinquante pour tout autre salarié.
— C’est juste ce que vous dites. Mais il y a quand même du travail en dehors des cours, de la préparation, de la correction…
— Tu rigoles ! Le niveau d’enseignement de la maternelle au CM2 ne nécessite quand même pas des heures de recherche, ou alors l’instit est un imbécile. Quant aux corrections, souviens-toi, je faisais cela en fin de journée pendant la récitation. À seize heures trente, j’avais terminé ma journée. Et concernant la préparation, il suffit de savoir en arrivant l’objectif que l’on veut atteindre : la division, la multiplication, l’accord du verbe avec le sujet, etc. Quant à ceux qui préparent des fiches chronométrées à la minute, rien ne se passe jamais comme prévu et ils sont toujours déçus parce que leur programme n’est pas respecté. Imagine, il se met à neiger. Tous les museaux sont tournés vers les fenêtres, inutile de parler de la dérive des continents ou des frisettes de Louis XIV. Garder l’objectif et toujours s’adapter, c’était ma devise.
— Et c’était très efficace. Combien de fois je me suis dit ensuite « ah, avec Monsieur Rezzin, c’était plus clair, je comprenais tout, tout de suite » ?
Le fromage et le dessert avalés, je propose à une Églantine gavée de faire une promenade digestive tout en continuant notre discussion. Nous descendons par la route jusqu’au lavoir, une enclave communale dans mon terrain qui va lui aussi ...
... jusqu’au Bouzon. Le lavoir a été très bien restauré et on imagine bien le travail des lavandières qui y œuvraient par tous les temps.
— Vous vous souvenez de celui de Couillac où l’on allait de temps en temps avec toute la classe ?
— Bien sûr. Il n’était pas aussi bien rénové que celui-ci, mais il était plein de ressources, grenouilles, têtards, filaments d’œufs…
— Oui, il y avait même une tortue que l’on voyait de temps en temps. Et on apprenait à reconnaître les baies dans les haies, on avait fait un herbier, tout ça…
— Eh oui, tout était prétexte à découvertes et apprentissages.
— Mais, ici, les femmes lavaient dans cette rivière ? L’eau n’a pas l’air très propre…
— Non, viens voir derrière… regarde ce petit bassin. Là, il y a une source d’eau claire qui alimente le lavoir. Tu vois le passage sans herbe, beaucoup de gens viennent remplir des jerrycans de cette eau pure, certains même la boivent. Parce que le Bouzon porte bien son nom : il y avait beaucoup d’élevage par ici et les vaches buvaient dedans et y lâchaient des bouses.
— Ah d’accord. Voyez, rien n’a changé, je suis toujours votre élève et j’apprends des choses avec vous.
— Pourtant, dix ans ont passé. Je ne suis plus instituteur et tu n’es plus une jolie petite fille, mais une jolie jeune femme.
— Hum… merci, en espérant que vous le pensez. Pourtant tout est toujours pareil, j’ai toujours autant d’admiration pour vous, votre savoir, la maison que vous avez si bien restaurée. Que c’est agréable de retrouver ...