1. Fanfreluches et clef à molette


    Datte: 11/07/2019, Catégories: nonéro, mélo, Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe

    ... ne me persuade que ça ne servait à rien et ne stoppe net mes beuglements. En tout cas, j’avais crié assez fort et assez longtemps pour en avoir mal à la gorge.
    
    La sonnerie carillonnante persista à me vriller les tympans une minute ou deux avant de s’arrêter elle aussi. Impec’, ça allait accélérer le retour de mes capacités intellectuelles. Et vu la situation, j’allais en avoir le plus grand besoin…
    
    Un acouphène vrombissant dans les oreilles, je ne remarquai pas tout de suite la disparition du ronron qui avait bercé chaque minute depuis mon arrivée dans l’abri. Le profond silence qui régnait autour de moi me fit enfin comprendre l’origine de cette perte brutale d’alimentation électrique : la génératrice avait cessé de fonctionner ! Ce n’était pas censé arriver. Jamais. Et surtout pas quand Alain était absent…
    
    — Oh, non ! Merde !
    
    C’était bien le mot qui convenait, car j’étais dedans jusqu’au cou. Les réflexes acquis lors de mon apprentissage ne me servaient à rien : le cœur de l’abri étant censé fonctionner en autonomie, l’entretien de la génératrice était minimum.
    
    Alors, pourquoi cette panne brutale, quelle en était la raison ? Aucune, me souffla mon esprit défaitiste, hormis le fait que cet organe fatigué avait été mis en place il y a plus de quarante ans, soit le double du séjour maximum prévue dans le bunker. Le temps avait fait son œuvre, voilà tout…
    
    Ça paraissait impossible ! Le vieux Keller, si méticuleux, si prévoyant, n’aurait pas négligé un point ...
    ... aussi crucial ! Ça ne cadrait pas avec la froide obsession de ce maniaque névrosé, son souhait désespérant d’offrir un havre de paix à sa famille, tandis que le reste de l’univers crevait sous les bombes…
    
    N’empêche, j’avais sur les bras ce qu’on peut appeler un problème majeur.
    
    ooOOoo
    
    Une fois habituée à la pénombre, je réussis à rejoindre la cuisine sans trop de mal. Contrairement à ce qu’on aurait pu croire, l’obscurité était loin d’être complète. Dans la pièce, une loupiote à nu répandait une faible lueur, vestige d’un éclairage de secours en voie de décharge rapide. Mentalement, j’ajoutai l’inspection des batteries de ce dispositif à notre prochaine tournée de maintenance. Comme s’il devait y avoir un « après », un « plus tard »…
    
    — Arrête ce délire ! Tu vas y arriver ! T’as pas le choix, de toute façon. C’est ça, ou bien…
    
    Crever ? Oui, certainement. Si je ne faisais pas repartir cette saleté de turbine, Alain et moi étions tous les deux condamnés. Lui, à mourir de faim dans mon ancien abri ; moi, dans un délai encore plus bref, à m’asphyxier.
    
    — Ben alors, perds pas de temps ! L’échec n’est pas une option, ma cocotte.
    
    Je sortis de mon immobilisme hébété, m’emparai d’une torche électrique – en parfait état de marche, heureusement – et descendis au troisième niveau avec précaution. C’était pas le moment de se casser quelque chose…
    
    La lampe projetait des ombres fantomatiques au mur, transformant cet endroit familier en caveau. Luttant contre mon angoisse, ...
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