1. Fanfreluches et clef à molette


    Datte: 11/07/2019, Catégories: nonéro, mélo, Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe

    ... : « inventaire de notre supermarché privé, rayon hygiène intime », espérant qu’il soit approvisionné en protections périodiques. Il ne me resterait plus sinon qu’à faire comme les Babyloniennes, préparer moi-même le nécessaire avec des bouts de tissu…
    
    Dans un monde ravagé par la bombe, il fallait bien s’attendre à ce que les produits manufacturés, même des plus basiques, se raréfient, avant de disparaître tout bonnement. Étrange, l’idée qu’une simple boîte de Tampax puisse devenir une possession inestimable… Étrange et déprimante. C’est bien le genre de réflexion à vous inspirer une vision angoissante du futur. Mais comment ne pas être angoissée, lorsqu’un incroyable carnage décime la population mondiale, que les radiations, les épidémies, la famine, se conjuguent pour finir le travail ?
    
    Aujourd’hui, tout le monde quasiment était mort. Tous mes proches, tous les gens que j’avais côtoyés un jour, tous mes amis sur Facebook, effacés d’un coup. Alors, au-delà de la zone vitrifiée par les bombes, que trouverions-nous ? Une civilisation en lambeaux, ayant reculée de mille, voire dix milles ans ? Quelques rescapés regroupés en clans archaïques, régis par une sauvagerie implacable ? Ce qui était sûr, c’est que pour les survivants que nous croiserions tôt ou tard sur notre route, nous ferions figure de nantis, de nababs. Ils seraient peut-être même prêts à tuer, pour s’emparer de nos trésors…
    
    Des larmes me piquaient les yeux, des pensées défaitistes me brûlaient la ...
    ... cervelle. Je devais absolument m’occuper l’esprit, penser à des choses pragmatiques ; je retournai donc m’habiller dans la chambre, avant d’entasser les draps ensanglantés dans une corbeille à linge. L’occasion d’une lessive supplémentaire, une fois mon petit-déjeuner avalé.
    
    ooOOoo
    
    Dans l’escalier, je repensai au baiser de la veille, au séisme dans mes rapports avec Alain. Devait-on en parler, mettre ça à plat, ou faire comme si de rien n’était ? Je regrettais de m’être laissée embrasser, de ne pas l’avoir repoussé. Pourquoi encourager ses avances, si je tenais tant que ça à ce que rien ne change entre nous ?
    
    Peut-être parce que je n’étais pas tout à fait indifférente à son charme… De mon côté, il y avait aussi une attirance, une réelle envie de lâcher prise. Des liens forts s’étaient établis, un attachement indéniable. Comment pouvait-il d’ailleurs en être autrement, envers une personne qui vous sauve la vie ?
    
    «Un homme, précisa une petite voix en moi. Intelligent, attentionné et carrément craquant qui en plus est. Une option à considérer, ma chère… »
    
    Alain n’était ni dans la cuisine, ni dans le salon. Je m’attablai avec pour seuls compagnons un jus noirâtre et une pile de tartines beurrées. En attendant l’arrivée de mon ogre domestique, je ressassais ce que j’allais dire, ou plutôt ne pas dire. Je l’imaginais, volontaire et déterminé, entrant dans la petite pièce avant de s’asseoir devant son café, puis me sondant d’un regard inquisiteur. En prévision, je me composai ...
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