Fanfreluches et clef à molette
Datte: 11/07/2019,
Catégories:
nonéro,
mélo,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... du mieux que je pus une contenance, mélange d’insouciance factice et de fausse désinvolture. Un ersatz d’innocence, qui avait fait fureur durant ma période Lolita.
Mon dieu, c’était terrible ! Je ne savais plus me comporter avec naturel ! Alors qu’hier encore, tout n’était qu’évidence et simplicité…
Loin de me soulager, l’absence d’Alain finissait par être agaçante. Que cherchait-il, en ne se montrant pas ? À me mettre la pression ? Mais qu’est-ce qu’il s’imaginait !? Que j’allais lui apporter son déjeuner au lit, avec mon corps pour dessert ? La plaisanterie avait assez duré. Je descendis les marches quatre à quatre et toquai à la porte de sa chambre.
— Alain, ça va ? T’es malade ?
Pas de réponse.
— Qu’est-ce qui y a ? Tu fais la gueule, ou bien t’es mort ? insistai-je, sans plus de succès.
Je collai mon oreille au contre-plaqué. Pas un bruit. Ça devenait inquiétant.
— Ok ! Je te préviens, je vais entrer ! Alors, fais en sorte d’être décent…
Avec une pointe d’angoisse, je comptai lentement jusqu’à dix, puis j’ouvris la porte à la volée. Personne. Le lit, à peine défait, était vide. À se demander si quelqu’un avait bien couché là cette nuit.
La serre ? La zone de stockage ? Le local technique ? Je courus d’un endroit à l’autre, le cherchant partout, ne le trouvant nulle part. Je devais me faire une raison, j’étais toute seule dans ce cercueil de béton…
ooOOoo
Mon anxiété me tétanisait, j’étais incapable d’aligner deux pensées cohérentes. Ça ...
... recommençait ! Après Piotr, c’était au tour d’Alain…
— Arrête de déconner, réfléchis un peu ! S’il n’est pas dans l’abri, c’est qu’il est dehors ! Va compter les combinaisons NRBC, pauvre cruche, tu verras bien…
Comme une automate, je me dirigeai vers le sas pressurisé. Bien joli tout ça, mais combien y en avait-il de ces fichues combinaisons, à l’origine ? Et surtout, pourquoi Alain serait-il sorti sans rien me dire ? Dans le sas, une surprise m’attendait. Une feuille de papier, scotchée à hauteur d’yeux sur le panneau métallique :
C’était signé « Alain-trépide ». Tordant ! Je reconnaissais bien là son humour pourri… En attendant, ce salaud avait projeté son expédition en cachette, avant de partir seul et sans prévenir !
Cette échappée belle n’avait rien d’une promenade de santé, toute exposition un tant soit peu longue restant dangereuse. La contamination, encore élevée en surface, rendait inutilisables les masques à gaz sur une telle durée – saturée, la cartouche anti-poussière laissait filtrer des isotopes radioactifs. Quant aux respirateurs isolants, leur autonomie était limitée à trois heures.
Conclusion ? Une virée de deux jours, et c’était la mort assurée…
Cette pensée me glaçait. Je revoyais encore Louis, Mathilde et Fabrice, quittant notre abri dans leurs combinaisons lacérées. Un suicide déguisé en mission de la dernière chance. Pourquoi Alain avait-il décidé de mourir ? Était-ce lié aux remords qui le poursuivaient ? À ma réaction d’hier ?
— ...