L'album photo d'Anne 3
Datte: 21/11/2023,
Catégories:
Entre-nous,
Hétéro
Auteur: Laetitia sapho, Source: Hds
... photographe pendant ces trois mois. Je suis même partie une fois dans la jungle avec des soldats américains. Une fois de plus, j’ai vu les horreurs de la guerre, des cadavres, la misère. Et puis ces jeunes GI venant à peine de sortir de l’adolescence, qui se demandaient où ils étaient, ce qui leur arrivait. C’est ça aussi l’horreur de la guerre.
Là-bas, j’ai surtout fait des portraits, de Vietnamiens, d’hommes, de femmes, d’enfants, mais aussi de ces soldats complètement désorientés. Regardez celui-là, si jeune, il est mort le lendemain du jour où j’ai pris cette photo. Nous sommes entrés dans un village, un sniper a tiré, il s’est écroulé. C’est le seul incident que nous avons eu lors de cette patrouille. J’ai refusé de le photographier au sol, agonisant. Le reste de la patrouille a apprécié mon geste. Avec les soldats de cette patrouille, au bout de quelques heures dans cette jungle hostile, sous la pluie la plupart du temps, avec la chaleur étouffante, et l’humidité ambiante, harcelés par les moustiques et surtout avec la crainte permanente de tomber dans une embuscade, les liens se sont forcément resserrés. Nous formions un tout, un groupe. Même si je ne me battais pas, si j’étais une fille, si je n’étais pas américaine, nous formions un tout. Le photographier mourant aurait été impudique, contre-nature même. Il s’appelait Ron, il venait du Kansas, il sortait de l’adolescence. Il m’a montré la veille de sa mort, la photo de sa mère et de sa fiancée au pays. Il est ...
... mort au Vietnam pour une guerre qui ne le concernait pas vraiment. Savait-il vraiment pourquoi il y était ? On utilise souvent l’expression « frère d’arme », c’est un peu ce que j’ai ressenti lors de cette patrouille. J’étais un peu leur sœur, même si au début, le premier jour, ils m’ont considéré comme un boulet pour eux, une charge qu’ils devaient traîner. Rapidement, dans la même galère qu’eux finalement, ils m’ont incluse au groupe.
Mon film préféré, c’est Apocalypse Now. Ce film dépasse largement le cadre du cinéma. Ce n’est pas seulement un film sur la guerre du Vietnam. C’est surtout un film sur la folie. Sur toutes les folies, sur toutes celles engendrées par la guerre. Ce film est un chef-d'œuvre, parce qu’il est criant de vérité. Je l’ai vu de mes yeux cette folie, cette peur dans le regard des soldats et des civils. Compliqué de la mettre sur pellicule, j’ai essayé, je m’en suis approchée, mais je ne suis pas certaine d’y être complètement arrivée. En partie sûrement. Francis Ford Coppola oui, mais c’est un génie.
Dans chaque camp, l’animosité entre les belligérants grandissait. Cette escalade aura engendré des excès de part et d’autre. Du côté Viêt-Cong bien sûr, mais aussi du côté américain et sud- vietnamien. Les nerfs des soldats US, pas forcément préparés à ce qu’ils ont vécu là-bas, étaient soumis à rude épreuve, et certains d’entre eux ont « craqué». Des civils innocents en auront fait les frais. On a beaucoup parlé du massacre de My Lai à l’époque, un ...