Le début
Datte: 22/05/2019,
Catégories:
fh,
inconnu,
prost,
telnet,
amour,
init,
poésie,
amiamour,
Auteur: Louise Gabriel, Source: Revebebe
... messages plus tard, un ultime coup de téléphone. Entendre le son de sa voix lui parut étrange, donner la vie, se retrouver dans la vibration des cordes vocales. Jusqu’ici il était resté une image, des mots, rien de réellement vivant et palpitant.
Elle avait préféré le recevoir chez elle, cela lui paraissait plus rassurant, la proximité de ses habitudes, son atelier, son jardin, rester dans les certitudes de son cocon pour prendre son envol vers une planète inconnue.
Elle passa sa matinée à aller et venir, dans l’hésitation, continuer ou annuler ce foutu rendez-vous, se dire que l’on est obligé de payer, quelle horreur ! Et finalement il était là, un peu en retard, les embouteillages lui avaient laissé un peu de répit, du temps à faire des huit avec sa cervelle.
Il était devant le portillon du jardin, il fallait ouvrir, cesser de tergiverser, se jeter dans le vide la tête la première, le cœur battant à tout rompre, l’incertitude, l’inquiétude, se dire qu’elle était totalement cinglée d’inviter un parfait inconnu pour lui faire l’amour, en payant de surcroît, et les images de faits divers lui défilaient dans la tête,« Une jeune femme morte égorgée par un inconnu, la police cherche des indices, aucune effraction n’est à signaler »…
Elle avait enfin ouvert la porte. Comme il était étrange, ce sentiment… Il ressemblait à ses photos mais il y avait un évident décalage, une nuance qu’elle n’avait pas sentie, pas perçue et qui, là, maintenant qu’il était devant elle, ...
... lui criait comme une évidence qu’il était homosexuel : la mouvance du corps, la gestuelle un peu plus appuyée, ces petits riens qui faisaient toute la différence. Elle avait rêvé d’un étalon latin et elle découvrait certes un très beau jeune homme, mais vraiment, vraiment pas celui auquel elle avait songé. Il était si différent de ce à quoi elle s’attendait… Enfin elle ne savait plus très bien ce qu’elle espérait, plus tout à fait. Elle était là, presque figée, suspendue à ses désirs voraces.
Alors, se dire bonjour avec un brin de gêne, prendre un café, s’asseoir, essayer quelque chose pour briser la glace, effacer l’angoisse commune, parce qu’à y bien réfléchir, ils étaient tous les deux dans l’inconnu absolu. Pourquoi avait-il accepté un tel rendez-vous, lui qui pratiquait exclusivement l’échange masculin, tarifé ou non ? Il lui expliqua pourquoi il était là. Par curiosité, à la suite de ses messages, pour son côté un peu perdue, pour sa manière de se présenter au fil des mots échangés, qui avaient été un peu plus longs pour lui qu’à l’habitude.
Leur temps était compté, chacun pour ses raisons. Elle le prit par la main, elle n’aurait su dire exactement mais elle perçut la légère angoisse et elle en fut émue, et la paume de ses mains avait une telle douceur…
Il avait avec lui son matériel, le nécessaire de ses rituels, de ses séances d’amour, sa musique, ses huiles, ses parfums. Lorsqu’il sortit ses plumes d’autruche, elle faillit éclater de rire, mais ses sourires ...