0202 Colère, regrets, remords, coup de fil et vent d’Autan.
Datte: 28/02/2018,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Fab75du31, Source: Hds
... no mountains too high, no river too wide ».
Jérém n’est pas hors de ma portée. Je peux rattraper le coup. La tâche peut paraître dure, elle peut sembler démentielle. Les mots d’un prof de philo me reviennent à l’esprit : lorsque la montagne parait trop haute, il ne faut pas regarder le sommet ; il faut regarder le bosquet qui se situe à quelques heures de marche, il faut avancer vers lui, comme si c’était le but ultime ; une fois atteint ce but, il faut se féliciter du chemin parcouru ; le lendemain, il faut chercher un autre bosquet, une roche, un pont : bref, un nouvel objectif réalisable, le poursuivre, l’atteindre, se féliciter à nouveau ; ainsi le lendemain et le sur lendemain. Au bout de quelques jours, lorsqu’on se retournera pour contempler le chemin parcouru, on sera étonnés et fiers de nos efforts ; et le sommet ne semblera plus si lointain, il sera à notre portée.
A 17h38 ce jeudi 6 septembre, le renoncement que j’avais envisagé une fois encore le matin même, n’est plus à l’ordre du jour.
Premier objectif, le « bosquet » : chercher à contacter Thibault.
Je reviens sur mes pas, je traverse la moitié de la ville pour me rendre au garage à côté de la gare Matabiau, je traîne à proximité pendant un petit moment en faisant mine d’être au téléphone : mais le bomécano n’est pas là. Sur le coup, je trouve cela étonnant ; du moins jusqu’à ce que je réalise que très probablement Thibault a commencé sa préparation physique et les entraînements au Stade et qu’il ...
... ne travaille plus au garage.
Je sors mon téléphone de ma poche, mais mon élan s’arrête vite, s’arrête net : j’ai à la fois envie de l’appeler et peur de le déranger, car je l’imagine bien occupé ; aussi, j’ai à la fois envie de l’appeler et peur de le faire, peur d’avoir trop attendu avant de revenir vers lui ; oui, au fond de moi, j’ai peur qu’il n’ait plus envie de me parler.
Appelle, Nico ! Demande-lui comment il va, pour commencer, ça ne pourra que lui faire plaisir. Appelle, ne te pose pas plus de questions : quand on s’inquiète pour un ami, il n’y a pas d’heure, il n’y a pas d’excuse, il n’y a pas de peur qui tienne pour ne pas prendre de ses nouvelles.
Un instant plus tard, je compose son numéro ; ça sonne une, deux, trois, quatre fois : j’ai le cœur qui tape à mille à l’heure, j’ai peur de ne pas trouver les mots…
J’éprouve un certain soulagement en me disant que je vais tomber sur le répondeur, que je vais pouvoir lui laisser un message sans avoir besoin de lui parler directement, sans avoir besoin de connaître son état d’esprit vis-à-vis de moi.
Mais ça finit par décrocher.
« Salut, Nico… ».
Le ton est calme, neutre, mais il n’y a pas l’emphase que je lui connais d’habitude.
« Salut Thibault… comment ça va ? ».
« Ca va, ça va… et toi ? ».
« Ca va aussi… ».
Thibault n’enchaîne pas tout de suite, je cherche mes mots aussi. Il y a visiblement un malaise.
« Tu as commencé les entraînements au Stade ? » je trouve enfin.
« Oui, il y a ...