0202 Colère, regrets, remords, coup de fil et vent d’Autan.
Datte: 28/02/2018,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Fab75du31, Source: Hds
... deux semaines… ».
« Ça se passe bien ? ».
« Nico… ».
« Oui… ? ».
« Je ne peux pas te parler là, je pars en mission… ».
« Tu es toujours pompier… ».
« Oui, bien sûr… ».
« Tu es un gars incroyable… ».
Silence de sa part.
« Je dois y aller… » il finit par lâcher.
« Thibault… ».
« Oui ? ».
« Je suis deso… ».
« Non, Nico » il me coupe net « c’est pas toi qui dois l’être… ».
« Je peux te rappeler demain ? ».
« Je ne sais pas trop… j’ai plein de trucs à régler… je te rappellerai moi, un de ces quatre… ».
« Ok, Thibault… ».
« Salut, Nico… ».
« Salut, Thibault… ».
Je raccroche, les larmes aux yeux. Vraiment, ce mec me touche profondément ; j’ai senti de la tristesse dans sa voix ; j’ai senti du malaise, de la distance entre nous : et ça m’arrache le cœur.
Thibault a coupé court à mon coup de fil et je ne peux m’empêcher de me demander s’il était juste pressé, ou s’il n’y a pas autre chose à retenir dans sa façon de m’expédier.
Est-ce qu’il essaie de se protéger de tout ce qui le ramène aux événements récents et douloureux, est-ce qu’il essaie de prendre de la distance et d’oublier comme j’ai voulu le faire moi aussi encore il y a quelques heures ?
Ou bien, est-ce qu’il m’en veut ? Est-ce que j’ai vraiment trop attendu longtemps pour revenir vers lui ?
Est-ce qu’il va vraiment me rappeler ? « Un de ces quatre », il a dit : une formule qui est souvent synonyme de « probablement jamais ».
18h01. Lorsque je rentre à ...
... la maison, maman me demande comment je vais. Elle me demande si j’avais eu des nouvelles de mon camarade après qu’il était sorti de l’hôpital. Lorsque je lui réponds que non, sa question est la même que celle d’Elodie :
« Tu as essayé de l’appeler ? ».
Une fois de plus, je me rends compte de la chance que j’ai d’être aussi bien entouré.
« Non… ».
« Il compte vraiment beaucoup pour toi, ce garçon ? ».
« Oui, beaucoup… ».
« Alors tu devrais essayer de l’appeler… ».
18h19, je monte dans ma chambre, bien décidé à envisager une nouvelle étape vers le sommet, une étape qui me fait particulièrement peur, celle du « pont suspendu sur la falaise » : appeler Jérém pour lui demander aussi « comment il va ».
Je m’allonge sur le lit, les yeux fermés, le cœur qui tape dans ma poitrine comme s’il voulait la défoncer.
Envie dévorante de le faire, d’entendre sa voix ; mais aussi peur de le faire, peur qu’il soit encore en colère contre moi, qu’il m’en veuille toujours d’être parti avec Martin, devant ses yeux ; peur de me faire jeter comme un malpropre ; peur qu’il me balance de nouvelles horreurs ; peur qu’il décroche, et qu’il soit froid, distant ; peur qu’il décroche et qu’il me dise de lui foutre la paix ; peur que ça décroche et de tomber une fois de plus sur une pouffe ; peur qu’il me raccroche au nez, comme la dernière fois ; peur qu’il ne décroche même pas.
Tant de peurs et quelques espoirs également : l’espoir que, depuis le soir de l’accident, les choses ...