1. Poésie brodskyenne


    Datte: 12/05/2019, Catégories: nonéro, exercice, poésie, Auteur: Brodsky, Source: Revebebe

    ... bouge au rythme
    
    de la sableuse et du marteau-piqueur
    
    du chantier d’à côté…
    
    « Danse, Mambo, danse ! »
    
    Des gens s’arrêtent, interloqués,
    
    sur le trottoir d’en face,
    
    effrayés, effarés,
    
    j’en vois un qui grimace…
    
    « Danse pour nous, Mambo ! »
    
    Soleil, marteaux-piqueurs, chaleur,
    
    poitrines offertes, agonie, sableuse…
    
    « DANSE POUR NOUS, MAMBO !!! »
    
    Ce n’est plus l’ordre d’une Reine :
    
    C’est le murmure d’une foule,
    
    C’est le cri de tout un peuple,
    
    C’est un tonnerre qui éclate :
    
    YEYE ALIFANYA HIVYO MVUA !!!YEYE ALIFANYA HIVYO MVUA !!!YEYE ALIFANYA HIVYO MVUA !!!Yeye alifanya hivyo mvua…
    
    Je suis à terre, épuisé.
    
    La Reine m’a rendu mon esprit
    
    Ou l’ai-je retrouvé seul ?
    
    Je suis nu sur le balcon ;
    
    La pluie tombe encore,
    
    La rue est vide…
    
    Seules les Africaines étaient belles aujourd’hui…
    
    TOUJOURS LES AUTRES
    
    Il y a des gens qui ne servent
    
    tellement à rien
    
    que personne ne les
    
    regrettera…
    
    Ni leurs amis,
    
    ni leurs parents,
    
    ni leurs enfants,
    
    ni leur chien, ni leur chat,
    
    ni leur ténia,
    
    ni leurs morpions.
    
    Des inutiles
    
    avec beaucoup de prétentions
    
    qui parlent fort,
    
    persuadés que leurs inepties
    
    deviendront des vérités
    
    s’ils les habillent de grands mots
    
    et les parent de venin.
    
    Ils y a des gens qui ne servent à rien,
    
    MAIS CE SONT TOUJOURS LES AUTRES
    
    QUI SE SUICIDENT.
    
    LA BÊTE IMMONDE
    
    S’il me prenait l’envie d’écrire une poésie
    
    dans laquelle je voudrais peindre le ...
    ... visage
    
    de la bête immonde,
    
    je ne la peindrais pas avec la mèche
    
    et la moustache du Célèbre Gnome allemand,
    
    ni avec le masque decommediante
    
    d’un Duce d’opérette,
    
    ni sous la casquette d’un petit père des peuples
    
    ou d’une de ces quelconques charognes
    
    pourrissant sous terre…
    
    Je la décrirais inculte, et ignorante
    
    de son passé,
    
    de son histoire,
    
    des besoins du peuple,
    
    des réalités sociales,
    
    des souffrances des petites gens…
    
    Je la décrirais arrogante,
    
    sûre d’elle-même,
    
    méprisant le suffrage universel,
    
    prompte à manier l’injure,
    
    faisant appel à la censure,
    
    s’arrogeant le droit
    
    de dire ce qui est bien ou mal,
    
    et partageant les richesses du pays
    
    avec ceux qui la servent…
    
    Je la décrirais augmentant les impôts des pauvres
    
    au nom de la Justice Sociale,
    
    persécutant les religions
    
    au nom de la laïcité,
    
    permettant des injections létales aux vieillards
    
    devenus une charge pour l’État,
    
    dépeçant les morts sans leur permission
    
    pour utiliser à nouveau leurs organes,
    
    préférant parler de la vie sexuelle de Proust
    
    plutôt que deLa recherche du temps perdu,
    
    lisant lesCinquante nuances de Grey
    
    plutôt queLe portrait de Dorian,
    
    incitant nos petits garçons à jouer
    
    à la poupée
    
    et à porter des robes,
    
    et nos petites filles à jouer aux camionneurs,
    
    se préparant à interdire le vin
    
    après avoir interdit le tabac…
    
    Et on me répondrait que j’exagère, bien sûr…
    
    Que personne, jamais, n’oserait aller ...
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