Cristal qui songe
Datte: 04/04/2019,
Catégories:
couplus,
jardin,
amour,
revede,
poésie,
exercice,
Auteur: Nono, Source: Revebebe
Note préliminaire : Ce récit vole le titre à un roman de Théodore Sturgeon. Mais ce n’est pas vraiment un vol, plutôt un hommage.
Nonchalance
Le jour où j’ai rencontré Cristal, ç’avait été un coup de foudre. Rien pourtant ne le laissait présager.
C’était la faute de Carine, tout ça. Carine, une amie commune, aimait squatter mon jardin pour des barbecues dominicaux, et elle avait entraîné ce jour-là cette adorable brune, étonnant mélange de douceur eurasienne et de fougue espagnole.
C’était un dimanche de juillet écrasé de chaleur, et mon jardin baigné d’ombre était comme toujours un havre de fraîcheur, un îlot préservé.
Cristal ! Rien que le prénom était de nature à étonner. Et là, jamais prénom ne m’avait paru si bien choisi. Cristal reflétait, c’était le cas de le dire, la lumière, elle étincelait.
J’avais été sous le charme dès la première seconde ! En arrivant, Carine avait dit « Ma petite poupée », pour me la présenter, et le mot était on ne peut plus juste. J’avais vu sortir de la voiture un visage rond, à la peau mate, suivi par une silhouette fine et gracieuse, le tout superbement mis en valeur par une robe courte, simple mais assurément de prix.
Timide d’abord, elle ne tarda pas à se détendre.
Je le confesse, leBollinger bien frais, que j’avais proposé sous le grand cerisier y était aussi pour beaucoup. Quel bonheur que d’entendre son rire… cristallin tintinnabuler dans la banlieue silencieuse. Et pour moi, chaque passage pour la resservir ...
... était l’occasion de plonger mon regard dans son décolleté, ou d’admirer le galbe de ses jambes. Quel sortilège faisait qu’une poitrine tînt aussi bien ? Cristal était parfaite.
Sexy, femme enfant un peu dominatrice, parfois chatte, parfois piquante… mais bien sûr, pas libre, grrrr ! Soyons honnête, son corps me fascina tout l’après-midi, encore plus, le sachant inaccessible.
Et qui plus est, elle était loin de n’être que ce corps de rêve.
Tant de vivacité d’esprit et tant de culture me faisaient pâlir d’envie. Toute son âme, tout son esprit me subjuguaient. Jusque tard dans l’après-midi, nous échangeâmes nos points de vue, à bâtons rompus, sur la religion juive, l’œnologie, les écrits érotiques, et d’autres sujets encore.
Je lui parlai bien sûr de mes écrits, et surtout de mes hésitations à publier. Je me perdais dans d’interminables évitements qui n’échappaient pas à mon interlocutrice.
Et plus je montrais la difficulté que j’avais à me lancer, plus je voyais les yeux de la belle se plisser. Petit à petit, les grands yeux de biche devenaient des yeux de chat.
À cause du champagne, puis duBandol qui accompagna le repas ? Peut-être un peu, oui, mais c’est surtout que ce regard me lisait, comme si j’étais un grand livre mal ouvert, me feuilletait, me fouillait, me perçait.
Lors d’un de mes multiples "Oui, mais…", elle partit soudain d’un grand rire.
— T’es adorable… mais… pourquoi tu écris, au juste ?
J’hésitai un instant, la question était bien ciblée ...