1. L'exposition


    Datte: 22/02/2018, Catégories: fh, amour, dispute, cérébral, rasage, nonéro, amourpass, consoler, lieuxpubl, Auteur: Isilwen, Source: Revebebe

    ... manque. De CE manque. Les yeux de Marion n’avaient cessé de se dérober sous ses ciseaux, le tenant en échec.
    
    Marion regardait cette dernière sculpture, écoutait cette ode à la passion aussi violente que joyeuse. Elle voyait son sculpteur, bousculé par le public impatient, anonyme parmi son œuvre, courbé, les épaules basses et les bras pendants, terminés par des mains qui semblaient perdues. Mortes.
    
    Et elle comprit.
    
    Elle venait de déchiffrer, comme les pianistes leur partition, dans une brusque lueur, le message que Raphaël lui adressait, à travers cette exposition, jusqu’à cette pyramide dressée comme un autel.
    
    Un autel conçu pour une offrande. Pas pour un sacrifice.
    
    Lorsqu’elle entendit les dernières notes de la Romance, elle se précipita vers l’escalier, s’empêtrant dans sa robe qu’elle abandonna finalement sur les marches mais serrant contre elle les outils de Raphaël. Elle se remit à genoux, comme il l’avait proposé, rassembla un peu le drapé de soie autour de sa taille, le cœur prêt à éclater, la gorge serrée par l’émotion, la peur. Dans quelques secondes, elle serait nue face à la foule, c’était de la folie, mais elle était déterminée. Il lui avait offert ses outils, elle lui offrirait ce qu’ils n’avaient pu saisir.
    
    Raphaël sentait son être se déchirer aussi sûrement que la photo qu’il avait ramassée chez Thomas. Les accords mineurs ne devaient pas sonner le glas de leur histoire, ils auraient dû avoir le temps de goûter les suivants, si lumineux ! ...
    ... Croches et doubles-croches lui tournaient la tête. Adossé à un mur, détourné de son exposition, il était tout juste conscient qu’il ne maîtrisait plus rien, pas même ses pleurs.
    
    Et lorsque les pianistes attaquèrent la Tarentelle, avec la force et la passion nécessaire à une telle œuvre, que la lumière lentement éclaira ce qui devait être le point d’orgue de l’exposition, la foule n’eut pour s’exprimer que le silence. Alors Raphaël leva douloureusement les yeux vers son échec.
    
    Mais Marion était encore là. Immobile, baignée dans une lueur dorée, dans toute la magnificence de sa beauté.
    
    Elle avait arraché son voile.
    
    De sa main gauche elle tenait contre son ventre sa trousse de cuir, protégée par la mousseline noire.
    
    Elle laissait les notes de la Tarentelle galoper dans son esprit, ses veines, l’apaiser et la rassurer, comme si son gantier la tenait serrée contre elle. Voilà pourquoi il disparaissait chaque matin. Devant elle s’étalait ce qu’il éprouvait pour elle, ce qu’il avait dérobé à son regard pour un temps.
    
    Le jeu, la joie d’être ensemble, ces centaines de notes qui couraient les unes vers les autres… Son cœur battait à tout rompre, les larmes de joie, de plaisir, d’émotion montaient seules une nouvelle fois de son âme, mais elle ne les cacha pas cette fois-ci, elle les lui offrait. Mi espiègles, do taquins, souvenir de leur jeu de séduction. Et ces accords, ces merveilleux arpèges où les deux pianos ne faisaient plus qu’un.
    
    Raphaël s’était avancé, ...