Bienvenue, pingouin ! (2)
Datte: 22/08/2023,
Catégories:
Hétéro
Auteur: Mr.523, Source: Xstory
Enfin ! Le calvaire est bientôt terminé. L’avion glisse sur le tarmac. Je regarde par le hublot... C’est bien – je ne reconnais rien... – c’est bien le Canada, c’te satanée colonie ?
On attend le top départ. Et « Top ! », nous démarrons tous, nous engageant dans le long couloir. On est tous là, moi et tous mes zombies... on marche dans la même direction, le visage meurtri par les longues heures de vol. Et « Stop ! » : un contrôle. Déjà ?
L’homme qui se tient devant moi vient d’une autre planète. Je dois me frotter les yeux. Il a des dreadlocks sauvages sur la tête ; on dirait un dindon faisandé qui gît sur sa caboche. Un putain de Bob Marley, et en tenue de policier ! Inexplicable ! Inaccessible ! Improbable ! Il faut imaginer l’incompatibilité de ce mirage : le rasta et la tenue de policier, ce n’est pas miscible – enfin, du moins tangible – dans mon esprit.
— Pardon ?
Il me parle. Oh, malédiction ! Tu entends ce qu’il te demande ? Le comble : il veut voir tes papiers ! Et lui, il les a, ses papiers ? Enfin, d’autres que ceux avec lesquels il s’envoie en l’air...
Il profite clairement de ma faiblesse, avec mes yeux rouges ensanglantés de fatigue, ma mâchoire ballante, désarticulée. Oui, de tous les autres cadavres qui me devancent et me précèdent, c’est moi le plus rongé.
Il me plante en douceur le mot « immigration » en me montrant une voie annexe à la sortie. C’est bon, je suis fait : il a dû me prendre pour un drogué ; ça, il sait les reconnaître. ...
... Traître ! Ma tronche ne te revient pas, hein ?! Mon faciès suinte la désobéissance depuis toujours, sache-le ! Oh, tu sais... Oh, tu as dû le sentir que c’était réciproque...
C’est l’œil triste que je regarde mes poulets sortir ; moi, c’est l’abattage de questions qui m’attend. D’ailleurs, attendre, attendre encore, tu n’as rien fait d’autre de ta journée ; de ta vie également !
— On vous en ressert un peu, Monsieur ?
— Non, merci.
— Mais si, mais si, attendez votre tour.
À mon tour. Je me redresse, félin, pour finalement tituber jusqu’au guichet. La femme derrière le bureau est aussi sympathique que regardante sur son régime. Elle laisse déferler toute sa haine sur moi. Pourvu que ça s’arrête ! Je devrais peut-être lui confesser un meurtre ; sa stupeur me laisserait quelques secondes de répit. Des questions, elle en pose trop. À la cinquième, je comprends à peine la première. Mon cerveau est tout ratatiné, une purée de neurones...
Mais bon sang, elle voit bien que je ne tiens pas debout derrière son guichet ! Elle voit bien que je m’agrippe aux rebords pour ne pas m’affaler ! Elle voit bien que, bouche béante, je bave sur son comptoir ! Elle voit bien que cette chaise est trop petite pour elle ! Misère... cette chaise est autant à plaindre que moi. Oh, condition désastreuse ! La pauvre n’en a pas fini...
La grognasse me tient la béquille. Elle a remonté toute ma vie, jusqu’au commencement : « Césarienne, ou naturelle ? » ; « Sucer son pouce, ou tétine ? » Et ...