Chrysalide - Histoires de Sexe

Chrysalide

... autrement, devait attendre dans sa petite cuisine.

— Mon whisky préféré, m’exclamai-je avec enthousiasme. Vous avez un goût exquis.
— Vous en avez parlé… une fois…
— Et vous vous en êtes souvenu, ça, c’est gentil.
— Y a longtemps, mais… on sait jamais.
— Et vous, que buvez-vous ?
— Oh… euh… un jus de fruits.
— Ah non ! Après les fantastiques nouvelles qu’on vient d’écrire, il faut fêter ça. C’est une sacrée réussite !
— C’est vrai. Alors je vais prendre… un peu de Martini.

Nous trinquâmes, l’alcool me réveilla et lui empourpra les joues. Lui arrivait-il de rire ou de sourire ? Si, une fois. Quand elle m’annonça le legs de notre bienfaitrice, je lui demandai sérieusement :

— Sommes-nous dignes d’un don ?

Et là elle a souri, peut-être même avec un petit ricanement nasal. Autrement, c’est le sérieux ambulant, cette fille ; la tristesse même. Elle m’apporta une bouteille de chianti, une de ces bouteilles ventrues à demi recouverte d’un paillage, avec un tire-bouchon. J’ouvris le vin, pensant qu’elle avait vraiment tout prévu.

— Tiens, je vais le goûter, il me fait envie. Ah ! L’Italie… Tout le soleil et la gaieté du monde dans une bouteille… (Elle rapporta un verre) Et vous ? Vous ne le goûtez pas ?
— Non. Déjà avec le Martini, je vais être un peu pompette… J’ai pas l’habitude.
— Ne me faites pas ça ! Le vin, ça se partage. Et puis j’ai ouvert la bouteille maintenant. Si vous n’en buvez pas, il va se perdre. Ce serait dommage.
— Vous l’emporterez…
— ...

... Mais non, allez. Sans vous forcer à boire, au moins goûtez-le et trinquons.
— Je vais raconter des raisons malades…
— Elle est loin votre chambre ?
— Juste à côté, répondit-elle en rougissant et montrant le couloir. Pourquoi ?
— Eh bien, vous ne risquez pas une sortie de route en allant vous coucher !

Nouveau sourire et elle se rapporta un verre. La pizza était fabuleuse et me rappelait vraiment le goût de celles qu’on trouve en Italie, bien différentes des nôtres, malgré leurs boîtes vertes, blanches et rouges.

— Où avez-vous déniché ça ? Je veux l’adresse…
— C’est moi qui l’ai faite.
— Alors là, chapeau bas ! Je connaissais certains de vos talents, mais là, vous m’impressionnez.

Elle sourit et rougit encore au compliment, piqua du nez dans son assiette en balbutiant un « merci ». Le dessert fut tout aussi agréable, une salade de fruits frais au fromage blanc.

— Mais dites, si je n’étais pas resté, qu’auriez-vous fait de tout ça ?
— J’aurais mangé de la pizza et de la salade de fruits toute la semaine…

Malgré tout, l’alcool aidant, la conversation s’anima, et Claudia commença à se livrer un peu, à parler d’elle. Fille d’agriculteurs, un accident de la route l’avait privée de ses parents à quatorze ans, et elle avait été recueillie par sa grand-mère, aujourd’hui décédée de vieillesse. Seule au monde, la vente de la ferme avait constitué un pécule confortable qui lui avait permis d’acheter ce petit appartement, proche de son travail. Je comprenais d’où ...