1. Le cantique du chien


    Datte: 29/03/2023, Catégories: nonéro, théatre, conte, Humour Auteur: Brodsky, Source: Revebebe

    ... prison que toi sur ton fauteuil de Président.
    
    Jupiter : Tu ne pourras plus aller et venir librement…
    
    Diogène : J’aurai un abri contre le froid, le vent et la pluie, plus confortable que l’amphore dans laquelle je dors. Et je n’aurai même plus à cultiver mes salades pour me nourrir.
    
    Jupiter : Si tu suivais l’enseignement de Platon, tu n’aurais pas à cultiver des salades.
    
    Diogène : Si tu cultivais des salades, tu n’aurais pas à suivre l’enseignement de Platon. Et ça t’éviterait d’en raconter au bon peuple, des salades.
    
    Jupiter : Imaginons, Diogène, que je te nomme demain Premier Ministre du Boukiztan, quelle mesure d’urgence prendrais-tu contre la peste ?
    
    Diogène : Je te ferai fusiller, toi et tous tes ministres.
    
    Jupiter : Et cela stopperait la peste ?
    
    Diogène : Non… Mais ensuite, j’abolirais toutes les lois que toi et tes semblables avez édictées pour enchaîner le peuple.
    
    Jupiter : Et cela stopperait la peste ?
    
    Diogène : Non… Ensuite j’enseignerais au peuple à se débarrasser de ses illusions et à fonder les relations humaines seulement sur la vertu.
    
    Jupiter : Et cela stopperait la peste ?
    
    Diogène : La peste, il y aura alors bien longtemps qu’elle aura disparu.
    
    Jupiter : Bref, le programme de Diogène contre la peste, c’est « ne faisons rien, attendons qu’elle passe ».
    
    Diogène : Au contraire, c’est toi, dans ton impuissance, qui ...
    ... dis cela. Moi je dis : « Profitez du confinement pour philosopher, pour vous débarrasser de vos illusions. Cessez de perdre votre temps avec ce qui n’est pas important. Agissez pour ce qui dépend de vous, et ne vous tracassez pas pour ce qui n’en dépend pas. Retournez à l’essentiel. Cultivez votre potager, jouez avec vos enfants, faites l’amour, récitez des poèmes, écrivez des lettres ou téléphonez à vos amis… Et que crève le vieux monde pourri des platoniciens. »
    
    Jupiter (se retourne vers MdP qui a filmé la scène) : Alors ?
    
    MdP : C’est enregistré, Votre Grandeur. Voilà de quoi le discréditer aux yeux du Boukiztan tout entier. Et le Boukiztan en entier… c’est énorme.
    
    Jupiter : Merci pour cet entretien qui fut très riche, Ô Diogène le chien. Je suis persuadé qu’il éclairera le monde sur ta pensée philosophique.
    
    (Jupiter et MdP sortent.)
    
    Diogène, l’enfant, musique Mighty like the blues
    
    Diogène retourne à ses salades tandis que la musique joue en sourdine.
    
    L’Enfant (arrive en courant) : Diogène, Diogène, j’ai encore soif.
    
    Diogène : Ben bois, l’eau est toujours là…(Il regarde l’enfant boire dans ses mains.)
    
    Enfant : Merci Diogène…
    
    Diogène : Attends un instant, viens voir…(Il approche sa lanterne de l’enfant.)
    
    Enfant : Que cherches-tu avec ta lanterne ?
    
    Diogène : Rien mon petit, je ne cherche plus rien. J’ai enfin trouvé, je crois…
    
    FIN 
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