Les Gibets de Savannah - Histoires de Sexe

Les Gibets de Savannah

... continuer à jouir ! Je l’abandonne pour aller aux nouvelles.

— C’est quoi ?
— Ben, comme tu vois…

Ce qu’il y a au bout de ma longue-vue, c’est un galion espagnol visiblement chargé jusqu’à la gueule comme en témoigne son tirant d’eau. Je n’ai aucune idée de ce qu’il y a dans sa cargaison, mais ce ne sont sans doute pas des plumes d’autruche.

— Je ne sais pas ce qu’il trimballe, mais ce monsieur n’a pas l’air d’avoir tellement envie de nous serrer la louche… Depuis qu’il nous a vus, il file à toute berzingue, toutes voiles dehors.
— T’as réussi à lire le nom de ce rafiot ?
— Apparemment, c’est la Corne d’Or…
— Et t’as hissé le pavillon noir ?
— Évidemment que non… Je te rappelle que le capitaine, c’est toi.
— Alors, branle-bas de combat ! Demande à l’équipage de charger tous les flingues qu’il peut et de se préparer à combattre.
— Les filles aussi ?
— Si on peut éviter qu’elles aillent au feu, j’aime autant… Mais on verra. Bon, tu sais quoi faire, je reviens.

Derrière moi et totalement étrangère à ces considérations somme toute bien futiles, Adélaïde n’en finit pas de couiner, Duchesse à ses côtés.

— Descendez, je crois que vous serez plus utile en bas.

De retour sur le pont et toutes les voiles hissées, la Belle Éloïse file bon train.

— Tu feras gaffe, Lepainsec, la carte indique des hauts fonds dans le secteur.
— Je suis au courant, répond-il, l’œil toujours à la longue-vue. Je jurerais d’ailleurs que ça fait deux fois qu’il racle le fond ...

... !
— Fais gaffe qu’on y ait pas droit tout pareil…
— Pas de risque, on a de l’eau sous la quille.
— Certain ?
— Si tu ne me crois pas, t’as qu’à jeter un œil à la proue, l’eau est tellement claire qu’on voit le fond…

Soudain, l’impensable se produit : alors que nous n’étions plus qu’à quelques encablures, le galion s’arrête brusquement. Cette fois, le banc de sable était définitivement trop haut et l’espagnol vient simplement de s’échouer.

— Préparez-vous à l’abordage ! Et ne tirez pas avant mon commandement !

Précision sans doute inutile, mais on ne sait jamais : je connais les lascars qui officient du côté des canons, et ils ont tendance à défourailler sans réfléchir… Et on a beau avoir mis au point une méthode pour recharger plus vite, c’est comme en amour : si tu décharges trop vite, t’es certain au final de te la mettre sur l’oreille.

Nous ne sommes plus qu’à quelques dizaines de mètres de l’autre navire lorsque des coups de feu retentissent, mais, à ma grande surprise, ils ne sont pas dirigés contre nous. Je ne sais pas ce qui se passe chez ceux d’en face, mais ça canarde dans tous les sens. Puis, soudain, tout s’arrête, je parviens même à distinguer un drapeau blanc qui se détache sur le nuage de fumée.

— Qu’est-ce qui se passe ?
— Aucune idée… Mais on ne change pas une broque de ce qu’on a dit.

Logiquement, dans la marine, un drapeau blanc ne se discute pas. Mais depuis l’arnaque de cet enfoiré de British au large de Saint-Malo, je me méfie… Nous ...