1. Louise - 1944 (2)


    Datte: 31/01/2023, Catégories: Hétéro Auteur: Bugsy, Source: Xstory

    ... Et puis aussi pour me souvenir, pour revoir cette plage, pour revoir la mer, essayer de retracer le chemin qu’alors j’ai fait. Comme pour me prouver que tout cela a bien existé. Pour oublier aussi un peu, je crois, car ces souvenirs sont trop présents, et je me dis que de revoir tous ces lieux, de vous revoir, cela me fera du bien, m’aidera un peu à oublier !
    
    - Oui, j’comprends ben ! Et faut vous dir’qu’vous êtes pas l’premier à r’venir par là. On en croise souvent, d’anciens G I qui viennent r’trouver leurs souvenirs. Pi même aussi, les parents d’ceux qui n’sont point r’venus. Et ça c’est beaucoup plus triste !
    
    Et puis Marie enchaîne :
    
    - V’savez, not’ Louison... elle parle souvent d’vous ! Elle nous reproche d’pas vous avoir d’mandé une adresse, quequ’chose pour vous r’trouvez !
    
    - C’est qu’on s’est ben renseignés à la mairie,renchérit Gaston, mais pas moyen d’mettre un nom su vous, vous étiez trop nombreux de la 4e division, et pi on n’savait pas trop comment vous décrire ! Avec l’treillis et l’casque, vous vous r’sembliez tous !
    
    - Mais la Louise, vous la verrez t’à l’heure, pasque vous allez prendre la soupe avec nous !
    
    - Louise, elle termine son service à quatre heures, et sur l’coup d’cinq, elle est là ! Et d’ailleurs, faut bien qu’elle m’aide pour la traite du soir !
    
    Gaston nous ressert une grande bolée de cidre. Avec le verre de vin bu à l’auberge et le cidre de Gaston qui est bien fort, je sens une douce torpeur m’envahir. Mais je me sens bien, ...
    ... presque comme chez moi. Ces gens sont vraiment gentils, vivent avec le cœur sur la main, je me sens véritablement adopté, et c’est comme si nous nous connaissions depuis bien longtemps.
    
    Ceci dit, c’est vrai... mais des années se sont écoulées depuis ma première venue ici. Et puis, j’étais resté si peu de temps, et surtout avec bien d’autres choses en tête !
    
    La matinée est déjà bien avancée, et nous passons à table. Un repas tout simple, mais qui a pour moi qui le découvre une saveur encore inconnue. Nous avons tant de choses à nous dire que la conversation ne faiblit jamais. Gaston me raconte la fin de la guerre, ici, la paix et la reconstruction. Et puis tous deux me posent une foule de questions, sur moi, ma vie, mon pays et mes occupations.
    
    À la fin du repas, alors que Marie nous verse un bon café qu’elle vient de moudre elle-même à l’instant, Gaston se lève et sort du buffet une carafe qui contient un liquide d’un brun léger.
    
    - Tiens mon gars ! Tu vas m’goûter ça !
    
    - Gaston !
    
    - Quoi la Marie ?
    
    - Mais Gaston... mais... tu viens d’le tutoyer !
    
    - Oui... et alors  ! I’m’plait bien moi, ct’américain. Et pi... l’a l’âge d’être not’ fils !
    
    Il se tourne alors vers moi.
    
    - Ça t’dérange mon gars si j’te dis tu ? Et pi, c’est quoi ton p’tit nom ?
    
    - Non... non, pas du tout, au contraire  ! J’apprécie beaucoup votre convivialité, votre gentillesse et votre confiance. Alors oui... vous pouvez me tutoyer sans problème. Quant à mon prénom, c’est Robert, mais ...
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