Petite chronique médiévale - Histoires de Sexe

Petite chronique médiévale

... furent occis.
— C’est donc cela, je regrette de n’avoir pas su sa disparition, mais je devais être moi-même en plein deuil. Aussi m’attendais-je encore à voir arriver une voiture lente et non un rapide cavalier. Soyez le bienvenu, Monsieur, et entrez, je vous prie, dit-elle en trébuchant légèrement. Pardonnez-moi, reprit-elle, mais ce genre de déguisement ne me convient guère. Ma mère est morte en couches en mettant au monde mon plus jeune frère, puis mon père a accompagné le Roi dans ses croisades, aussi me suis-je élevée parmi des garçons et… un peu comme un garçon. Aussi je préfère la chasse à la couture et à la tapisserie, et ces atours me sont fort pénibles à porter, un comble paraît-il pour une duchesse.
— Madame, s’il vous plaît de vous mettre à votre aise, je n’y verrais point d’inconvénient. Moi-même j’ai eu l’audace de me présenter à vous avec la poussière récoltée sur les chemins, car la voiture m’ennuie et me bouleverse le boyau. Je préfère grandement chevaucher.
— C’est très bien ainsi. Dans ce cas, prenez le temps de vous rafraîchir et je vais me mettre à l’aise. Mathilde, donnez au Comte tout ce qu’il souhaite pour se remettre de son voyage.

Le Comte fut dépoussiéré, put se laver mains et visage et étancher sa soif d’une large pinte d’excellent vin. La Duchesse réapparut en chausses noires, bottes noires et justaucorps de cuir bordeaux, sa longue crinière noir corbeau flottant sur ses épaules.

— Voilà, c’est ainsi accoutrée que je me sens bien, bien ...

... loin de ce que devrait porter une Duchesse.
— Et c’est ainsi que je vous reconnais quand vous avez failli tantôt me vider de mes étriers en passant, à l’allure d’une flèche, au raz de ma monture qui s’en est cabrée.
— Oh, c’était donc vous ? J’en suis navrée. À la chasse comme souvent, on m’a dit que le Comte venait de passer par le village et de s’y rafraîchir. Redoutant d’être en retard, j’ai galopé jusqu’ici pensant bien arriver avant le carrosse supposé de votre pauvre père.
— Mais que vouliez-vous donc lui demander ? S’il s’agit de soutien militaire, il vous est tout acquis.
— C’est bien plus que cela, en vérité, et peut-être est-ce plus délicat à exposer au fils qu’au père. Je vous prie de ne point vous offusquer de ce que vais vous dire, et serai sans précautions comme à mon habitude.
— Parlez, je vous prie.
— Mathilde, sortez s’il vous plaît et tenez la porte bien close, éloignez les intrus.
— …
— Eh bien voilà pourquoi j’ai souhaité cette entrevue. Père est mort, Childéric, son fils aîné, également. Raymond, mon plus jeune frère est entré dans les ordres comme il est d’usage dans nos familles. Il y excelle du reste, étant actuellement en Avignon dans l’entourage de Sa Sainteté. Ce garçon avait en fait hérité de toute… la féminité que je n’ai pas eue, et je soupçonne tous ces vieux prélats d’en profiter largement, ce qui expliquerait promptitude de son ascension. Me voici donc élevée soudainement au rang de Duchesse et en charge d’un duché sévèrement entamé par ...