Un homme à la mer - Histoires de Sexe

Un homme à la mer

... semence tiède. Il s’excusa d’avoir joui si vite, trop excité par le spectacle de ses pieds comprimant sa bite, désormais flasque, lui réclama un peu de patience, lui promit de s’occuper à présent de son plaisir. Mais elle en avait perdu toute envie. Elle s’essuya les pieds d’un Kleenex, renfila sa jupe et son débardeur de sport, chaussa ses tennis blanches, quitta la chambre, paya à la réception, et roula plus d’une heure sans destination particulière. Elle venait de renoncer au tennis. Entre autres.

— … et puis là, j’ai vraiment merdé sur toute la longueur. Je crois bien que c’est l’excuse du froc qu’elle a pas digéré, que je mette ça sur son compte. Le froc, la monnaie, le parcmètre, la bagnole, tout. Moi. Ma nullité. Elle est trop parfaite, je suis trop foireux. Vraiment trop con…

Le jeune homme avait fini sa longue tirade, il se taisait. Il finit par relever la tête, et pour la première fois, la dévisagea. Comme s’il venait seulement de s’apercevoir de sa présence.

— Vous me disiez que vous aviez envie de baiser, ou je me trompe ?

Elle se figea, lâcha un profond soupir, le regarda en silence.

— Laissez tomber, j’ai dû me tromper. Désolé, ne le prenez pas mal. Parfois, j’entends des voix.

Elle haussa les épaules. Elle n’avait pas l’air dans son assiette, se dit-il. Alors il chercha quelque chose à lui dire, quelque chose de sincère et d’aimable, et ça tomba sur la première chose qui lui passa par la tête.

— J’aime bien vos pieds.
— Je vous demande ...

... pardon ?
— Je disais que j’aime bien vos pieds. Leur forme, leur aspect. Ils sont jolis, racés, élégants.

Elle ne réagit pas vraiment, seul un demi-sourire apparut sur ses lèvres, tandis que son regard se perdait au large.

— Vous regardez quoi, à l’horizon ?
— Le supertanker.
— Ouais, il navigue vers la Hollande. Rotterdam, sans doute.
— Eh bien j’aimerais qu’il mette cap à tribord et machines toutes, et puis qu’il s’éventre sur le brise-lames, et que des flots puants de fioul surgissent en geysers.
— Ah bon, et pourquoi ça ?
— Parce que ça mazouterait ces saloperies de mouettes qui tournent autour de moi en criant pour se foutre de ma gueule.
— C’est vrai qu’elles font chier, les mouettes.
— Les mouettes et le reste.
— Parfois, oui, je trouve aussi. Surtout le reste.
— On est bien d’accord.
— Mais c’est chiant aussi, le mazout. Ça fait des boulettes sur la plage. Ça colle aux pieds.

Elle le regarda cette fois en riant, lui adressa un clin d’œil amical, se leva d’un bond et se cassa, avant de se retourner un bref instant.

— Si j’étais vous, je crois bien que je courrais la rejoindre. Elle m’a l’air d’en valoir la peine.

⁂

Inge Vanbeek raccroche le combiné du téléphone. Toujours la même explication à fournir. D’abord en flamand. En enchaînant souvent sur le français, ensuite, bien que ce soit officiellement déconseillé, à défaut d’être formellement interdit. Parfois même en anglais ou en allemand. Oui, vous pourrez récupérer votre voiture à la ...