1. Quarante méduimètres


    Datte: 14/08/2022, Catégories: fantastiqu, amour, revede, caresses, Oral conte, Auteur: Serafin, Source: Revebebe

    ... laquelle A’oy flotte contraste fortement avec les arcs électriques qui se forment entre ses tentacules et la montre. C’est comme s’il transférait toute son énergie, toute sa vitalité, dans la pile-bouton. L’aiguille des heures tressaute, avance d’un cheveu, et revient à sa position initiale. Enfin, la grande aiguille fait un pas vers le midi avec un tic sonore. Mélisse voudrait prendre le méduine dans ses bras et sauter de joie ; mais elle n’ose déranger son intense concentration. Au lieu de cela, elle se lève pour préparer un thé. Les feuilles de thé sont devenues un luxe hors de prix depuis l’Ère des Excès, mais l’occasion mérite célébration. Et la présence d’A’oy également.
    
    Méduine et humaine sont assis côte à côte sur deux chaises aux lignes épurées – encore des antiquités de Mélisse – et sirotent leur thé. La montre du grand-père est chargée et ronronne ; leur contrat s’arrête là. L’air est épais et trouble. A’oy méduit quelques mots, s’interrompt, hésite, puis continue. Il pense continuer à flotter dans la région de Sjensk, il pourrait repasser d’ici quelques mois lorsque la pile de montre sera à nouveau vide. Il ferait même un détour pour une de ces délicieuses pizzas et la compagnie humaine allant avec, ajoute-t-il avec un clin d’œil (il faut avoir vu un jour un méduine faire un clin d’œil : en l’absence de paupières, c’est le chapeau entier qui se contracte sur l’un des huit yeux. Et parfois, ne faisant pas attention, le méduine cligne de l’œil opposé à son ...
    ... interlocuteur, de sorte que celui-ci voit seulement le chapeau se distendre puis reprendre sa forme). Mélisse savoure le compliment, mais vu l’état de ses finances, il est probable qu’elle n’ait plus ni montre ni boutique ni toit d’ici ces quelques mois.
    
    A’oy la fixe attentivement lorsqu’elle lui méduit, avec moult gestes et erreurs syntaxiques sous l’émotion, ses déboires depuis la mort de son père : la boutique pour seule source de revenus, les impayés qui s’accumulent, les acheteurs frileux. A’oy s’agite inconfortablement. Les méduines ne se préoccupent pas des problèmes humains, mais la jeune femme aux cheveux fous le touche. Ce n’est pas avec quarante méduimètres de tension qu’il pourrait l’aider, mais…
    
    — Mélisse, que dirais-tu de parler affaires ?
    
    Elle le fixe, incrédule.
    
    — Quoi ? Une pizzeria pour méduine ? méduit Mélisse.
    — Mais oui : les méduines vont raffoler de tes pizzas. Et les humains qui ont besoin d’électricité pourraient trouver les méduines dans ton restaurant. C’est un des problèmes de la vie nomade des méduines : on n’est jamais là au moment où un humain a besoin de nous, et on meurt de froid d’avoir raté les occasions. Bref, les méduines viennent pour les pizzas, les humains pour les méduines, et tout ce monde est à côté de ta boutique d’antiquités.
    — Certes… mais tenir une pizzeria en plus de la boutique, c’est un travail monstrueux.
    — En tant qu’associé, je me charge de tout l’administratif. Je mets mon tentacule au feu que d’ici deux mois tu ...
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