Avant l'heure, c'est pas l'heure... - Histoires de Sexe

Avant l'heure, c'est pas l'heure...

... soif, entouré d’une foule sentant la sueur à mesure que les heures passent était ma drogue des vendredis et samedis soirs.

Je dis était, car tout a changé depuis peu. D’un coup. Sans besoin de sevrage. Sans manque.

2 h 39. Voilà bien une heure qui restera gravée à jamais comme fatidique. Tout comme ces quelques mots de cette voix. Une des plus douces que je n’ai jamais entendu, malgré un timbre grave, éraillé, que je mis sur le fait qu’elle avait dû, comme beaucoup, chanter faux à tue-tête en dansant.

— Y’A D’AUTRES ENDROITS MOINS CHERS POUR BOIRE UN COUP.

Encore aujourd’hui je ne sais pas pourquoi ce hurlement, à quelques centimètres de mon oreille, plutôt que me mettre hors de moi, me charma.

Quittant le verre que je tenais des yeux, et, croisant du regard le barman qui, presque horrifié de voir quelqu’un m’adresser la parole et, de fait, perturber mon habituel recueillement du samedi matin, je lui fis non de la tête afin de stopper son approche qui, sans nul doute, l’aurait conduit à demander à cette personne qui osait m’adresser la parole de s’éloigner ; comme il l’avait fait en de nombreuses occasions déjà.

Le cerveau humain à des capacités parfois surprenantes !

Après s’être vautré durant des années dans une déchéance voulue et entretenue, il peut, en l’espace d’une seconde, tirer un trait radical sur ce qui fut un inconditionnel besoin. C’est ce qui se produisit, ce samedi, à 2 h 39 du matin.

— Oui, répondis-je sans hausser le ton et sans ...

... regarder celle qui osait troubler, après ma solitude, mon être comme jamais personne n’avait su jusqu’alors émouvoir.
— En plus tu danses même pas. T’sais pas ?

En plus d’apprécier la douceur de ces mots, prononcés sans crier, je frissonnai en ressentant leurs souffles au creux de mon oreille. Chaque son, chaque syllabe, était une caresse.

— Sais pas. Jamais essayé.
— HA ! HÉ ! UN COCA LIGHT, S’IL VOUS PLAÎT !

À nouveau, je stoppai le barman qui venait chercher cette sacro-sainte carte de paiement d’un signe de tête, lui désignant le tiroir dans lequel gisait la mienne.

— Donc tu sais pas si t’aimes ou pas ! Faut essayer pour savoir, reprit-elle.
— J’aimerais pas… Si. Je sais que j’aimerais pas, insistai-je en regardant le barman lui porter sa commande.
— Offert, déclina-t-il, tout en s’éloignant, la carte qu’elle lui tendait.
— T’espères quand même pas qu’en m’offrant un verre, tu vas me pécho, me dit-elle sur un ton à la fois rieur et sérieux. Paradoxal, mais si… prometteur.
— Sauf erreur, si quelqu’un cherche à pécho, il me semble que ce n’est pas moi qui aie abordé l’autre.
— Exact ! Un zéro… Donc tu penses que je veux te pécho ? brisa-t-elle le silence qui ne gênait qu’elle.
— Moi, je pense que j’étais tranquille avant que quelqu’un n’arrive comme…
— Un cheveu sur la soupe ? tenta-t-elle de finir ma phrase.
— Non, m’insurgeai-je ! La meilleure chose depuis longtemps.
— Hé ! Suis pas une chose moi, OK ?
— Désolé.
— J’déconne là !
— Désolé.
— Tu ...