La falaise (1)
Datte: 04/05/2021,
Catégories:
Divers,
Auteur: Doogy Woogy, Source: Xstory
... transformait en une pente raide et herbeuse où des buissons épars poussaient sans toutefois pouvoir offrir un véritable couvert pour leurs ébats. Ils grimpèrent l’escarpement avec précaution pour ne pas glisser. Une anfractuosité déformait le versant, abritant une végétation qui, ainsi protégée, s’était développée. L’endroit idéal. La marée basse avait attiré avec elle les rares baigneurs à profiter encore de cette belle journée.
Martha embrassa Bertrand. Elle lui fit signe de s’allonger ; il ne se fit pas prier. Il fut amusé par sa requête. Elle souhaita qu’il garde les yeux fermés tant qu’elle ne lui ordonnerait pas de les rouvrir. Il songea que malgré la facilité avec laquelle elle s’était laissée convaincre, Martha avait un reste de pudeur au moment de se déshabiller devant un parfait inconnu. Il trouvait cela touchant. Il accéda donc à sa demande avec d’autant moins de réticence que ce soupçon de timidité accroissait le plaisir qu’il prendrait à la sauter.
Tandis qu’il fermait les yeux, elle entonna une mélopée. Il était à deux doigts de céder à la curiosité. Quelle surprise lui préparerait-elle ? Elle se pencha sur lui, souffla sur son visage, l’invitant à imaginer le vent du large. Elle souffla encore et encore…
— Hey, tu n’es pas obligé de me cracher dessus pour simuler la pluie !
Il n’obtint pas de réponse, pas de réaction.
— Martha !
Toujours rien. Il ouvrit les yeux.
****
Le vent soufflait. La pluie fouettait son visage. Il ne pleuvait pas. ...
... La barge cinglant vers la plage soulevait des trombes d’eau sur une mer agitée. Le bruit assourdissant des moteurs couvrait celui des embarcations heurtant les vagues. Tout autour de lui des hommes, tête basse et silencieux, ne prêtaient aucune attention à lui. Ils étaient tous en uniforme. Même lui. Que foutait-il là ? Quelques instants auparavant, Bertrand était allongé, prêt à forniquer. Martha l’avait-elle si profondément endormi qu’il rêvait déjà ? L’odeur de la mer était pourtant bien prégnante. Ce n’était tout compte fait pas une preuve puisqu’ils étaient au pied de la falaise. Mais le vent, les embruns, tout était bien trop réel pour être un rêve. La sensation de roulis, l’odeur du vomi, il ne les imaginait pas. Il ne put dire si le dégueulis répondait au mal de mer ou si la cause était autre. Autre ? La trouille. Il commençait à la ressentir. Doublement ! Il ne se trouvait pas à l’endroit où il était censé être, et celui-ci ne serait pas une sinécure.
Comprenant la situation, il se mit à trembler. Il tenta de raisonner, mais les circonstances n’avaient rien de raisonnable. Il leva la tête, regarda le ciel dans une tentative de prière de non-croyant. Son regard se heurta aux nuages bas. Une pluie fine commençait à tomber, puis ce fut une pluie dense de balles qui sifflèrent. Les rampes de la barge s’abaissèrent et la boucherie commença.
Bertrand se trouvait dans les derniers rangs. Il vit les corps s’entasser, formant un mur qui le sauverait peut-être. Attendre ...