0220 Adieu, mon Jérém (Saudade).
Datte: 27/04/2021,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Fab75du31, Source: Hds
... chose, la peur de ne plus jamais le revoir.
J’ai envie de l’appeler, de lui dire de faire demi-tour, de m’amener à Paris avec lui. Mais je ne le fais pas. Qu’est-ce que je ferais à Paris avec lui ? Est-ce qu’il voudrait de moi à Paris ?
Le ciel est couvert, il fait froid. Lorsqu’il fait gris, le paysage de la montagne s’habille de couleurs ternes. Et cela s’emmêle à ma tristesse, lui offrant un terreau fertile.
Je regarde la 205 jusqu’à ce qu’elle disparaisse de ma vue, engloutie par le brouillard. Et même après, il se passe un long moment avant que j’arrive à quitter la rue des yeux.
Je suis son ourson, il est mon petit loup, j’ai sa chaînette, je ne la quitterai jamais. Il a mon briquet, il pensera à moi à chaque fois qu’il allumera une clope. Je m’accroche à cela pour empêcher la douleur de me terrasser.
Je me dirige vers ma voiture, mais je n’ai pas envie de prendre la route. Ce petit village où j’ai passé les moments les plus heureux de ma vie semble me retenir.
Je ne peux m’empêcher de faire un dernier tour à l’épicerie. Sous prétexte d’acheter un truc à boire, j’ai envie de prolonger un peu plus mon séjour à la montagne.
« Oh, Nico, t’as l’air à ramasser à la petite cuillère » fait Martine, sans détour.
« C’est dur de le voir partir ».
« Mais vous allez vous revoir, j’en suis certaine ».
« Alors, il a aimé le briquet ? » elle enchaîne.
« Je crois que oui ».
« Ca m’a fait plaisir de te rencontrer Nico, et je suis certaine que ceci ...
... n’est qu’un au revoir et que nous reverrons bientôt ».
Les mots et l’accolade de Martine me font un bien fou. Je trouve enfin le courage de rejoindre ma voiture et de quitter ce petit Paradis sur terre.
A la sortie du village, le brouillard m’enveloppe. Il fait gris, il fait humide, il fait hiver. A l’horizon, les nuages et le brouillard se confondent, la terre et le ciel se mélangent.
Mon regard est une dernière fois happé par les éléments simples et puissants, immuables, l’eau, la roche, par la nature indomptée de la montagne, une nature qui force le respect et remet à sa place. Une nature qui impressionne et qui ramène à l’humilité.
Les larmes aux yeux, je zappe la radio. J’ai besoin de musique pour me changer les idées, pour m’empêcher de penser à cette séparation, pour ne pas devenir fou. Je zappe jusqu’à capter les rares fréquences qui passent entre ces montagnes.
Mais à chaque fois je tombe sur des émissions qui parlent d’une seule et unique info, les horribles événements de la veille.
En roulant, je regarde les maisons, les arbres, les rues, les villages, les commerces, les voitures, les passants. Tout me paraît étranger, comme si je revenais après un très long voyage et que tout avait changé pendant mon absence. J’ai l’impression que depuis 24 heures, il s’est écoulé un siècle. En écoutant les infos, je réalise que je vais retrouver un monde qui n’est plus celui que j’avais quitté en montant quatre jours plus tôt.
J’écoute juste quelques instants, ...