1. Cicatrices


    Datte: 08/04/2021, Catégories: amour, cérébral, revede, nonéro, conte, Auteur: Freddy Warmbread, Source: Revebebe

    ... suffit, toi ! Tu commences vraiment à m’énerver avec ton pessimisme ! Tu seras toujours perdant !
    — Mais enfin, c’est horrible, tu ne t’en rends pas compte ! Déjà que j’ai horreur des bisous, mais en plus d’une inconnue, c’est une vraie torture ! Et puis elle n’est peut-être même pas humaine, qu’est-ce que t’en sais ?
    — Est-il bête, celui-là ! Tu ne pourrais pas dire des choses intelligentes, de temps en temps ? Maintenant ouste, tu m’entends, sinon je vais me fâcher !
    — Serait-ce une déclaration de guerre ?!
    — Exactement !
    — Très bien ! Nous verrons bien qui l’emportera.
    
    La guerre entre Rouge et Noir commença ainsi. Elle allait durer des jours, même des semaines. La gagner ne serait certainement pas facile, d’autant plus qu’il s’agissait d’une guerre à trois : car Blanc s’en mêlait aussi. Tout le monde vous le dira, faire ménage à deux n’est pas tous les jours évident, mais alors à trois, pensez-vous ! Alternativement Rouge s’alliait à Noir et à Blanc, ce qui était assez ingérable. La nuit, Blanc arrivait à chasser Noir et Rouge chaque soir embrassait la photo de Fée et s’embrasait à son tour : « Fais de beaux rêves, Fée, mon p’tit cœur, mon p’tit chou, je t’aime. » Mais à chaque fois que la vraie Fée se trouvait dans les parages, Noir distillait autour de Rouge un bouclier qui l’empêchait de l’approcher, ou plutôt qui faisait dire à Rouge qu’il ne pouvait pas l’approcher. Rouge tentait de forcer le bouclier : il n’arrivait pas encore à l’ouvrir mais commençait à le ...
    ... fendre malgré tout. Il le fendait de plus en plus.
    
    Noir sentit ses forces l’abandonner ce jour-là, un mardi vingt-neuf avril, en début d’après-midi. Rouge venait de passer l’oral d’anglais portant sur le chapitre II deThe Great Gatsby. Jusque-là, rien d’extraordinaire. Rouge avait fini, mais il attendait. « Qui ça ?? » aurait demandé Noir, ben Fée évidemment. Rouge avait exprès regardé son horaire de passage avant même le sien : elle ne devait pas tarder à arriver. Effectivement, quelques minutes plus tard, elle se tenait là, à l’autre bout du hall du lycée. Noir s’empressa d’étaler son bouclier, mais le retira prestement, car Colosse venait à la rencontre de Rouge. Noir en avait une peur bleue. Colosse discutait avec Fée et Rouge restait là sans rien dire, à contempler ses cheveux. Il n’avait pas l’air très malin, ainsi planté comme un poteau, mais quand on est amoureux il est difficile d’avoir l’air intelligent. Il eut juste le courage de lui souhaiter bonne chance pour l’oral d’anglais, mais un peu à la manière d’une grenouille enrouée car les mots restaient coincés dans sa gorge. Rouge préféra se taire et sortir.
    
    — Et si on parlait de ton avenir ? demanda Colosse, avec tout son naturel.
    — Oui, justement, parlons-en.
    — Comment t’imagines-tu plus tard ?
    — En chercheur de linguistique. Mais je ne pensais pas à cet avenir-là, mais de l’avenir dans quelques mois.
    — Et donc… ?
    — Tu te souviens du 26 mars dernier…
    — C’est précis comme date. Moi, les dates…
    — Eh bien ...
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