La Dernière Prophétesse - Histoires de Sexe

La Dernière Prophétesse

... toi, noble dragon du Sud, dit-elle enfin.

Le dragon d’or écarta largement ses ailes pour ralentir son allure, se posant au milieu de la clairière ombragée. Comme il se tint debout, à deux pas devant elle, sa tête dépassait la jeune fille confiante. Il n’était pas très grand, signe de son jeune âge, mais ses yeux exprimaient une profonde expérience.

— Et avec toi la paix, jeune humaine de par-delà les mers. Que l’harmonie règne sur les tiens.
— Et qu’elle s’étende au monde tout entier, continua la jeune fille en s’inclinant. Que l’âme de tes ancêtres connaisse la quiétude du Nirvana.
— Je n’ai aucune crainte quant à l’âme de mes ancêtres. Le Nirvana accueille ceux qui étaient des sages. C’est plutôt vers ton âme que pourraient se porter mes inquiétudes. Ton trouble résonne à mille lieues à la ronde comme le chant funèbre d’un monde qui s’éteint.
— Craindrais-tu pour l’équilibre de cette terre, dragon ? Craindrais-tu que le repos des esprits soit troublé par mon âme ?
— Sur ces terres, tu n’es pas une humaine, mais une cellule singulière de notre écosystème. J’ai ressenti ton trouble tel une aiguille acérée s’enfonçant dans le cœur de la Mère Nature. Je ne crains que pour toi, humaine de la jungle.

À ces mots, Shalvarya perdit quelque peu son sourire et abaissa son regard. Devant elle, son destin était en train de s’accomplir et elle ne pouvait s’en défaire. Cette voix intérieure se fit entendre encore, en une question perfide :

— S’il t’était offert que le ...

... regard des Grands Esprits se détourne de toi, le voudrais-tu seulement ?

Shalvarya ne connaissait que trop bien la réponse.

— Pourquoi crains-tu pour moi, dragon ? Te parais-je si faible face au courroux de la nature ? Ou bien crains-tu pour mon âme que tu sens tourmentée ?
— Nous savons tous les deux ce que je devrais craindre. Tu es faite de forces, destruction et création sont tes compagnes. Tu pourrais anéantir ce monde, comme tu pourrais lui apporter une paix éternelle.

Shalvarya réfléchit. Ainsi, ce dragon inconnu paraissait la comprendre. Elle aurait pu en être surprise, mais une voix en elle susurrait à son cœur qu’il devait en être ainsi. Ce n’était pas là la voix du Destin, mais une parole plus douce, chaude et réconfortante.

— Reste avec moi, dragon, dit-elle enfin. Il est dit que nul vivant ne connaît les secrets du destin, et ses chemins sont multiples autant que sinueux. Pourtant, humains comme dragons pouvons faire le choix d’un chemin ou d’un autre. Reste avec moi, dragon. L’existence reste égale, sans moi ou avec moi. Ta vie avait un sens, je t’en propose un autre.
— Pourquoi resterais-je ? demanda le dragon. Mon royaume s’étend sur les plaines de sable. Le désert est riche de proies, les dunes sont le règne de la sérénité. Là est mon territoire. Je crains pour toi, humaine, mais je ne peux m’établir là où n’est pas ma place.
— Que me veux-tu alors ? Tu viens ainsi vers moi pour t’enfuir soudain ?
— Il me fallait te voir. Je ne puis l’expliquer. ...