1. Mon patron, cet abruti (3 / 7)


    Datte: 19/09/2020, Catégories: fh, Collègues / Travail hsoumis, champagne, nonéro, Humour hsoumisaf, Auteur: Anne Grossbahn, Source: Revebebe

    ... fait de l’objet du délit. L’a-t-il planqué ailleurs dans la pièce ? L’a-t-il repris chez lui ? Je me rappelle ses regards sur moi, ses yeux occupés à rouler comme des boules de loterie au moment du tirage, et me dis que ce célibataire vivant chez sa maman a peut-être fourré le soutien-gorge sous son oreiller et fantasme dessus le soir au coucher.
    
    Je sursaute en entendant le bourdonnement de la gâche électrique et le bruit de la porte qui s’ouvre et se referme. Je n’ai même pas le temps de tenter de savoir qui vient d’entrer, car la lumière s’éteint immédiatement, et me voici plongée dans l’obscurité la plus totale !
    
    — Hé ! Oh ! J’suis là ! dis-je à voix haute.
    
    Silence.
    
    — Hé ! Quelqu’un ?
    
    Toujours ce silence. Je me redresse et, à tâtons, tente de me diriger vers la sortie.
    
    — Allez, quoi ! C’est pas des blagues à faire !
    
    Ma voix manque totalement d’assurance.
    
    — Je vous préviens : je vais hurler !
    
    Je reste immobile entre les rayonnages. J’ai conscience, une fois de plus, d’être parfaitement ridicule. Il ne s’agit pas d’une panne de courant, puisque l’éclairage de secours ne s’active pas. J’ai entendu la porte, de toute façon. Celui ou celle qui me fait cette blague idiote doit bien se marrer en sourdine. Je suis certaine que tous mes collègues seront mis au courant de ma réaction, et je devine déjà les rires sous cape et les œillades ironiques dont je serai la cible dans les prochains jours.
    
    J’observe le silence le plus complet et tends l’oreille, ...
    ... essayant de capter le bruit d’une respiration… mais seuls me parviennent mon propre souffle et les battements désordonnés de mon cœur. Puisque nul ne répond, c’est que je suis à nouveau seule, ou que la personne qui est entrée n’est pas ressortie mais essaie de faire croire le contraire.
    
    Je commence à me déplacer très lentement, le long des rayonnages, frémissant à l’idée que quelqu’un puisse être tapi quelque part à me guetter et attendre que je passe à sa portée pour m’assaillir ! Je m’accroupis et reste immobile, silencieuse et tenaillée par l’angoisse. Moins je ferai de bruit, plus je percevrai aisément le moindre mouvement.
    
    De longues minutes s’écoulent, mais rien ne se produit.« T’es ridicule, Marielle », me dis-je.« C’est juste une blague ». Je pense pouvoir attribuer la plaisanterie à Axel le rigolo plutôt qu’à François le timide maladroit, mais sait-on jamais ?
    
    Je me décide enfin à bouger, me redresse et, à une lenteur désespérante, progresse vers la porte. Lorsque j’estime être parvenue à proximité du battant, ma main cherche la poignée, tandis que l’autre part vers l’interrupteur et l’actionne. Au moment où la lumière revient, me faisant cligner des yeux, je sens sous mes doigts quelque chose accroché au bec-de-cane : c’est une enveloppe, suspendue par un morceau d’adhésif !
    
    Intriguée, je la détache et la palpe. Elle semble contenir du papier et un petit objet. D’un coup d’ongle, je déchiquette le bord, puis découvre une clé plate et une feuille blanche ...
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