Le choix de Brumaire - Histoires de Sexe

Le choix de Brumaire

Paris, Douze Brumaire An Deux (02/11/1793), quelque part dans un ancien hôtel particulier réquisitionné, je termine un ultime papier. Dehors, le temps est maussade, la luminosité est basse. Soudain on toque à la porte, un sans-culotte entre, pique en main :

— Citoyen Barotey ?
— Oui, citoyen ?
— Nous avons avec nous le « colis » que vous nous avez fait quérir.
— Très bien ! Entrez, vous tous !

Je me lève, la porte s’ouvre, quatre hommes poussent trois femmes au milieu de la pièce. Malgré leurs haillons mouillés par le crachin du dehors, malgré l’évident manque de soins, ces trois femmes sont indéniablement belles. Néanmoins, on peut découvrir sur leurs visages quelques stigmates des privations dues à la prison.

— Enlève leurs chaînes, citoyen.
— C’est pas très légal, ça…
— Où veux-tu qu’elles fuient, citoyen ? Par la porte ? Par les fenêtres ? Ou par la cheminée ? Tu les rattraperais sans problème. Enlève leurs chaînes, j’en prends la responsabilité. Puis vous tous, laissez-nous seuls.

L’homme défait les chaînes en grommelant :

— V’là, c’est fait, citoyen…
— Très bien. Maintenant, patientez dans le couloir, j’en aurai pour un certain temps. En attendant, à tour de rôle, vous pourrez aller faire un petit tour en cuisine. Dites que vous venez de ma part, ils sont prévenus.

Un large sourire éclaire la face des geôliers :

— Bien, citoyen.

Puis tous obéissent en sortant de la pièce. Je montre aux trois femmes les sièges disposés devant le bureau, les ...

... invitant à s’asseoir :

— Merci, Mesdames, d’avoir répondu à mon invitation. Je me présente : Citoyen Jean-Amédée Barotey. Asseyez-vous, je vous prie.

Après un moment de flottement, se consultant muettement du regard, elles s’exécutent. Deux des femmes restent intimidées, ce qui n’est pas le cas de la brune :

— Je vois, Monsieur, que vous avez un certain sens de l’humour !
— Et moi, je vois que vous avez un certain sens de la répartie, Citoyenne Marie-Louise.

Celle-ci s’étonne :

— Vous me connaissez ?
— Oui, je vous connais toutes les trois. Vous êtes célèbres, mais par ces temps qui courent, cette célébrité vous a nui. Marie-Louise, la brune volcanique ; Marie-Denise, la blonde ravageuse ; et Marie-Élisabeth, la fausse innocente châtain ; les trois Marie, telles les trois Grâces ! Quelle injustice que vous soyez à présent sous les verrous !
— À qui le dites-vous, Monsieur ! Nous n’avons rien fait de mal !

Posant ma main sur le bureau pour me saisir d’une plume, je souris :

— Non, en effet, vous n’avez donné que du bien aux hommes. Néanmoins, il est vrai que ceux que vous avez éconduits n’ont pas apprécié. Votre enfermement doit avoir été aidé par l’un d’entre eux. Ou plusieurs d’entre eux…
— Vous croyez, Monsieur, que c’en est la cause ?
— Pas que. Rien que votre dernière phrase est suspecte. On ne dit plus Monsieur, mais Citoyen. Vous représentez un peu trop ce monde volage et nanti que le peuple a fini par détester.

Marie-Denise, la blonde aux ...