[Sci-fi] Fièvre rose (4)
Datte: 29/02/2020,
Catégories:
Divers,
Auteur: Narcisseique, Source: Xstory
... de rire et lui rabats le clapet une fois pour toutes.
— Je sais pas de quelle unité tu sors, a priori tu n’es pas d’ici. Sache que personne ne récompense les agressions sexuelles dans ce secteur, alors tu vas gentiment déguerpir; et ne m’adresse plus la parole. Estime-toi heureux de t’en sortir avec le nez cassé.
Sur ces mots, il s’en va. Je soupire, plus qu’agacée, en colère que la machine laisse à nouveau exister de tels comportements. Où est la satisfaction pour l’humanité de traîner ses casseroles d’un autre âge ?! J’ai vraiment du mal à comprendre ce que fait la machine depuis la "panne". Ah, oui. Il y a Fièvre rose. Non, en fait, j’ai ma petite idée sur ses intentions. Oui, c’est assez clair. La machine remet au goût du jour le sexe vrai, longtemps relégué au bas-fond. Oui, peut-être, notre société a-t-elle été lâche de se consacrer tout entièrement aux plaisirs virtuels. Les tabous se sont renforcés. Ah, nous avons bâti un drôle de meilleur des mondes.
Je souris. Oh, et puis, j’en ai marre de sourire. J’ai dû sourire au moins trois fois aujourd’hui et, quelle ironie, c’est un malotru désuet qui m’a soutiré le premier éclat de rire de la semaine. Cela ne me ressemble pas. Le mec que j’ai remballé tout à l’heure est déjà loin, derrière. Je suis satisfaite de la tournure qu’ont prise les évènements. A m’entendre penser, je me sentirais presque reconnaissante envers ce sale type. Il m’a prouvé que j’étais capable de réagir comme j’en ai toujours rêvé en cas ...
... d’agression. Je n’avais été en contact avec ce phénomène révolu qu’en visionnant des archives lorsqu’on avait encore accès à la bibliothèque en ligne. Oh, si je m’étais tenue aux recommandations de l’époque, je l’aurais flanqué devant un juge et un tiers lui aurait réglé son compte selon le principe de la proportionnalité judiciaire : c’est-à-dire, selon les anciennes lois, appliquer une peine "strictement et évidemment nécessaire".
Que faire cependant, lorsque de telles structures n’existent plus, que le respect mutuel est entré dans les mœurs, qu’il n’y a plus de loi, car plus besoin de discipline pour que les comportements soient "bons", que faire lorsque tout va de soi que la formalité et les règlements ont disparu faute de besoin ? Il n’y a plus de police, plus de magistrats, plus de gardiens des lois ni de la morale, plus d’autorité ni de faiseurs de normes. Personne n’est prêt à ce que des "problèmes de la vraie vie" surviennent. Nous avons depuis longtemps réinvesti notre temps à créer et résoudre des problèmes inexistants. Nous sommes passés à autre chose. Nous nous bâtissons des difficultés pour la beauté de l’acte.
Notre sentiment de liberté est bien ridicule. Nous avons engendré un geôlier tout puissant. Nous vouons une confiance aveugle en une machine pour répondre à nos besoins. Non, je l’avoue, je fais semblant de m’en offusquer. Je suis contente, comme tout le monde, qu’un cerveau plus puissant et sage que le mien prenne les décisions importantes à ma place. ...