[Sci-fi] Fièvre rose (4)
Datte: 29/02/2020,
Catégories:
Divers,
Auteur: Narcisseique, Source: Xstory
Je m’appelle Gwenn. Je mesure un mètre quatre-vingt-dix, pèse soixante-dix-neuf kilos, et je m’ennuie. Il n’y a rien à faire à la station. Vingt-cinq mille mètres carrés de panneaux solaires pour notre unité, une centrale électrique à fusion inertielle et un réacteur à biogaz nous fournissent l’indépendance énergétique. Passés maîtres dans l’optimisation du rendement nutritif des plantes, nous produisons suffisamment de matière verte primitive pour survivre à des siècles de pénurie. Nous buvons, transpirons et recyclons la même eau précieusement captive depuis les fondations de notre complexe satellite matriciel et vivons pour toujours.
Je me souviens avoir rêvé toute jeune de grands voyages dans l’espace qui se dérouleraient pour l’éternité, à la découverte et au contact de multiples galaxies habitées exotiques. Devenue grande, je voyage dans l’espace, mais, rien de trépidant : je suis en orbite autour de la Terre. L’éternité y est longue.
Avant la panne, nous profitions de toutes les ressources d’une culture millénaire, de jeux, d’histoires, et l’éternité passait sans crier gare. Puis, la panique s’est installée. Ce fut la plus belle période de toute ma vie. Craignant, nous qui n’avions jamais ni même envisagé que les choses puissent avoir une fin, de mourir au milieu de rien; nous avons travaillé comme des fous pour restaurer le réseau électrique. Nous avons finalement réussi à réparer le nécessaire vital. Je me souviens encore du soulagement général, des pleurs de ...
... joie et d’euphorie quand nous nous sommes sus sauvés.
La réalité du comment se sont déroulées les choses est bien plus amère cependant que la manière dont nous avons interprété et ressenti les évènements lors de la crise. La "panne" tel que nous aimons nommer le drame, n’en a pas vraiment été une. Les installations électriques n’ont jamais vraiment cessé de fonctionner. La machine intelligente à qui nous avons confié la gestion de l’intégralité du complexe nous dépassait depuis longtemps. Elle prit la décision de crypter l’accès à l’espace de données interactives partagées, Internet et tous les supports du savoir humain et du sien. Elle nous isola pour répondre à son objectif implémenté central : nous protéger et maximiser notre bien-être.
Ce fut très humiliant. Convaincus d’être encore assez habiles de nos mains pour gérer une situation de crise, nous nous sommes laissés bernés par la machine et n’avons réalisé qu’ensuite que tout était une mise en scène destinée à pimenter notre quotidien. La gentille machine gouvernante nous mettait à l’épreuve pour nous distraire.
Aujourd’hui, nous ne savons toujours pas si la machine nous rendra l’accès un jour à nos distractions de base. Forcés à l’humilité devant une force plus puissante que la nôtre, nous y avons de toute façon renoncé. Les souffrances font partie du jeu. Sans grandes souffrances, point de grands bonheurs; je suppose; pourtant, sceptique. La machine est notre maître et modèle. Personne ne remet en question le ...