55.5 Après le déluge (partie 2, Gruissan – Toulouse)
Datte: 27/01/2020,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Fab75du31, Source: Hds
... exclus par leur famille, au point que leur vie n’est en effet plus supportable, parce qu’ils ne peuvent compter sur personne ?
Mettre fin à ses jours ce n’est pas la bonne solution, même si ça peut le sembler dans un moment de désarroi : rien ne vaut ce geste, même pas face au chagrin le plus insupportable ; quant aux cons qui s’emploient à rendre insupportable la vie d’autrui, jamais, jamais, jamais, ô grand jamais, ils ne doivent gagner.
La fin d’un amour c’est un gâchis épouvantable ; mais il n’est pas plus grand gâchis que celui de ne pas découvrir ce que l’avenir nous réserve.
Malgré tout, je redoute le retour sur Toulouse et tout ce que cela implique en termes de choc émotionnel : je sais que je ne suis pas encore complètement guéri, loin de là ; je redoute les souvenirs qui vont venir à moi à l’instant où je vais retrouver les lieux familiers, cette ville, ses rues, cette maison, la chambre qui ont servi de décor à ce premier amour fini.
Une seule chose est capable de rendre l’idée de ce retour moins insupportable : c’est la perspective de retrouver ma maman, cette maman que j’adore et qui est désormais au courant.
Pendant le séjour à Gruissan, je l’ai eue régulièrement au téléphone : mais nous n’avons jamais reparlé de ce qui s’est passé ce jour-là. En, fait, je n’ai pas vraiment envie d’en reparler avec elle, j’ai surtout besoin de sentir sa présence, cet amour, cette bienveillance qui chauffe et soigne mes blessures.
Quand j’y pense, j’ai encore ...
... du mal à me dire que maman est désormais au courant. C’est une bonne chose qu’elle le soit, je ne regrette pas une seule seconde ; ce que je regrette, c’est le fait que mon coming out ne se soit pas du tout passé comme je l’avais imaginé ; qu’elle ait pu entendre les échos de notre dispute, qu’elle ait été confrontée à l’image du sang, des coups, de la violence ; je regrette les circonstances dans lesquelles elle a eu la confirmation de mon attirance pour les garçons.
Sur le moment, j’ai été triste pour elle, j’ai été inquiet qu’elle s’inquiète pour moi. Mais ma maman a des ressources incroyables, et elle très bien su gérer : c’est grâce à ses mots et ses gestes adorables et pleins d’amour qu’elle a su balayer mes inquiétudes, porter les tout premiers soins d’urgence à mon cœur blessé.
Oui, c’est une bonne chose que maman soit au courant.
Pourtant, et c’est quand même bizarre, je me sens presque nostalgique de ma vie d’avant, quand personne ne savait encore, ou du moins quand je pouvais penser que personne ne savait ; une vie qui me rendait malheureux, certes, mais qui recelait un « jardin secret » qui faisait partie de ma spécificité.
Je me suis construit dans la dissimulation, dans la peur que les parents, les amis ou les connaissances, apprennent qui j’étais vraiment ; mon secret, et la crainte qu’il soit découvert, sont devenus au fil du temps presque des raisons d’être.
Etre gay n’est pas ce qui me définit uniquement en tant que personne, mais ça en fait ...