1. La nouvelle Cendrillon


    Datte: 18/03/2018, Catégories: fh, amour, nostalgie, Auteur: Café-clope, Source: Revebebe

    Elle se laisse tomber à mes côtés, à bout de souffle. Ses paupières sont mi-closes, et sa bouche s’entrouvre dans un sourire à peine esquissé.
    
    Je me rends compte que nous ne nous sommes rien dit depuis que nous avons franchi la porte. Elle m’embrasse sur l’épaule, puis s’allume une cigarette. Dans la pénombre, la braise m’évoque un sémaphore rouge, la voie à suivre. Une destination.
    
    Et quelle destination…
    
    Je caresse des yeux ses courbes. Elle est en eau. Qui est-elle, au fond ? Elle se tourne vers moi, et me demande d’une voix amicale si je ne veux pas ouvrir la fenêtre. Bien sûr. À cette heure-ci, peu de risques que le voisin d’en face soit encore debout pour nous voir à poil. Je n’ai pas le temps de revenir me coucher qu’elle est déjà à côté de moi. Sa peau est si blanche que j’ai l’impression de côtoyer un fantôme, pourtant bel et bien fait de chair et de sang. J’aimerais…
    
    J’aimerais qu’elle reste un peu. J’aimerais faire sa connaissance, pénétrer sa vie après avoir pénétré son corps. J’aimerais qu’elle me dise de quoi est faite sa vie. Ses (dé-)goûts, ses (dés-)espoirs. Il n’en sera rien. Bien que tacite, le contrat est clair. Nos corps sont collés, et pourtant, c’est un univers insondable qui nous sépare. Et aucun de nous n’a le droit d’y mettre un coup de pioche. Que me reste-t-il à faire ? Elle se penche un peu à la fenêtre pour remarquer qu’à l’horizon, au-dessus de la forêt, le ciel commence à s’éclaircir. Message reçu, son carrosse va bientôt redevenir ...
    ... citrouille.
    
    Je me poste derrière elle, passe mes bras autour de sa taille, et dépose un baiser sur son épaule salée. Je n’ai pas envie de répondre à sa remarque, il faut que je la retienne. J’ai encore envie de ses caresses, de sa douceur, de sa chevelure qui vient brûler ma peau. J’ai encore envie de me déverser en elle. De vibrer.
    
    Ne faire qu’un avec elle.
    
    Ses yeux verts désabusés contemplent le lointain. Elle n’est déjà plus là. Je ne fais déjà plus partie de son existence. « À quoi tu penses ? » Je promène mes mains contre son ventre et me sens durcir contre ses fesses. Merde !
    
    Elle se tourne vers moi, prend mon visage dans ses mains, et m’embrasse, en douceur, comme elle ne l’a pas fait une seule fois depuis hier soir. L’espace d’un instant, je crois que…
    
    Ma bouche lâche la sienne, et j’entreprends de descendre au fond du précipice retrouver cette source à laquelle je me suis maintes fois désaltéré dans la nuit.
    
    Pourtant, elle me repousse délicatement, ses longues mains arachnéennes posées sur mes épaules. Paralysé, je la regarde en contre-plongée dramatique. À genoux devant elle, mon regard d’ordinaire triste doit être suppliant. Elle passe ses doigts dans mes cheveux, en souriant légèrement. Elle aussi a un peu l’air triste.
    
    — Je peux pas rester, tu sais…
    
    Mais si, tu peux !
    
    Tu ne le veux pas, c’est tout. Tu ne veux pas de moi.
    
    OK, c’est bon. Je rends les armes. D’un geste exaspéré, robotique, je saisis un paquet de cigarettes et en extrais ...
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