1. Si tu veux, tu sais où me trouver


    Datte: 26/10/2019, Catégories: fh, nonéro, mélo, amourdram, regrets, Auteur: Vince et Lise-Elise, Source: Revebebe

    Salut Jerem’,
    
    Je me suis demandé comment commencer cette lettre. Comment on fait, pour écrire au type qui t’a lâchée, il y a dix ans ou presque ? Il pleuvait ce jour-là. Chaque fois qu’il pleut, j’y repense. Dans ce putain de pays… compte !
    
    J’ai revu Caroline. Un hasard. Je l’ai croisée au supermarché. Caro, tu sais qui c’est, bien sûr ? Je suis bête, elle, tu la vois toutes les semaines. Elle a grossi, ça lui va bien…
    
    Caro, le jour de la fête foraine, elle a eu la main heureuse, elle. Pourquoi c’était pas moi ? Elle parle de Denis et son sourire lui fait plisser les yeux encore aujourd’hui. Heureuse, Caro. Et des gosses, à voir le contenu du caddie. Moi, je parle pas de toi, ou alors je chiale. Ou je sors en griller une, quand je pense à toi, je fume. T’as bousillé dix ans de ma vie et je me fabrique un cancer en pensant à toi, si ça se trouve je te fais rire, en disant ça.
    
    J’étais une gamine. 19 ans et des Kickers, quand je vois des filles en porter, je me dis qu’elles ont la vie belle. Et toi, 20 ans mais un adulte, tu savais, toi, ce que tu faisais et pas moi, merde, t’aurais pu te rendre compte que j’étais trop fragile pour ça. Un frimeur, oui. L’appart’, le fric et la bagnole, ça suffisait pour rouler des mécaniques. Et puis les doigts d’or, tu parles ! Facile de réparer les caisses pourries des copains quand on bosse dans un garage. Les pièces, tu les avais à l’œil et tu les faisais payer quand même. Amoureuse mais pas conne. Je les voyais tes magouilles. ...
    ... J’te pensais débrouillard, aujourd’hui je dirais malhonnête. Alors j’aimerais bien savoir pourquoi tu me pourris la vie, encore. Dix ans, putain !
    
    Il t’a fallu une seconde. Juste ta façon de m’inviter à danser, comme ça, sans rien dire en me tendant la main, comme si c’était plié. J’t’avais jamais vu, pourtant. Comment t’as su que ça allait être si facile ? Comment t’as fait pour m’avoir comme ça ? Amoureuse, folle, à la première seconde. Tu m’avais pas touchée que t’aurais pu m’allonger sur la piste de danse, direct, parce que j’aurais rien pu refuser. Tu m’avais même pas embrassée. Juste tendu la main. Et je me suis serrée contre toi en me disant que c’était ma place, tu me caressais le dos, un peu les fesses aussi, mais c’est tout, tu m’embrassais pas et j’en mourais d’envie. C’est venu bien plus tard, dans le train fantôme, je t’avais dit que je voulais y aller pour pouvoir recommencer à me serrer contre toi, comme si les squelettes en plastique avaient pu me faire peur. Tu sais tout ça…
    
    Je lui ai demandé, à Caroline, comment t’allais, parce qu’elle me parlait de toi. Elle a dit bien, très vite, elle était pressée, il fallait qu’elle y aille, on avait discuté dix minutes. « Bien », « Bien », ça veut dire quoi ? Je suis sûre que t’as grossi, que t’as pris du bide et perdu des épaules, que t’as plus trop d’cheveux, aussi, tu ressemblais trop à ton père pour pas prendre sa calvitie. Tu vois, j’suis lucide. T’as changé, moi aussi. Moins naïve, Steph. Dure. Ils le disent, ...
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