1. Échec et mat


    Datte: 22/10/2019, Catégories: fh, fplusag, handicap, plage, amour, Oral pénétratio, Auteur: Radagast, Source: Revebebe

    ... amie vient de m’annoncer qu’elle me quittait ; cette annonce faite le jour des obsèques de ma grand-mère. Je me trouve dans un nœud spatio-temporel, un trou noir où tout se trouve broyé, même le temps, même moi.
    
    La journée est dure et fatigante, j’ai affaire à d’anciens fumeurs en état de manque. Je ne doute pas que si je sentais quelque peu le tabac, ils me boufferaient ou essaieraient de me fumer. De nouveaux clients m’interrogent, pleins d’espoirs, et veulent tout connaître.
    
    Pour couronner le tout, la clim vient de tomber en panne.
    
    En revenant chez moi, j’en ai oublié l’anecdote du matin ; passant près de l’échiquier, je remarque qu’une pièce noire a été déplacée : cavalier G8 en F6. Une écharpe flotte sur le cou de la pièce, une petite lettre y est accrochée. J’y jette un coup d’œil :Voulez-vous jouer avec moi ?
    
    Quelqu’un a trouvé ma « bouteille. » J’examine cette missive, à la superbe calligraphie, faite de pleins et de déliés. Amusé, je bouge une de « mes » pièces blanches : pion C2 en C4.
    
    J’ai pratiqué il y a de cela quelques années les échecs. J’y étais même assez redoutable ; maintenant, je me sens rouillé.
    
    Je fais une ouverture classique, une « Française » ; je verrai bien si demain mon adversaire continue la partie. Il faut savoir que lorsque l’on joue sur Internet – ou comme ici – à distance, c’est intéressant, mais lenec plus ultra reste le face-à-face, où l’on affronte son adversaire en chair et en os. On se regarde dans le blanc des yeux, on ...
    ... cherche à faire craquer l’autre ; une bataille psychologique.
    
    « Mercredi 21 mai, vous écoutez France Bleu… »
    
    Il fait beau, les oiseaux chantent, et sur l’échiquier géant le pion E7 est passé en E6. Un petit sourire aux lèvres, je fais passer mon cavalier de G1 en F3. Jusque-là, tout baigne : c’est souvent au cinquième coup que les choses se corsent.
    
    Toute la journée je songe à cette partie contre un inconnu. Je ne prête guère attention à mes clients ; cette partie me change les idées.
    
    Pion C7 en C5 : il vient de jouer un coup étrange. Il veut contrôler le centre, agressivement. Je réponds par pion D4 en D5.
    
    Évidemment, le soir ; mon adversaire prend, E6 en D5 ; en guise de représailles le pion noir disparaît. C’est une partie classique, mais elle ravive de vieux souvenirs. Après quelques recherches sur Internet et dans les rares bouquins qui me restent, je trouve : 1972, Spassky contre Fischer, Reykjavík. La partie de légende !
    
    Le lendemain, aucune pièce n’a bougé. Je suis un peu déçu ; il me manque quelque chose pour bien démarrer la journée. Une petite écharpe flotte sur le dernier pion déplacé. Je déplie le billet qui y est accroché :Vous avez trouvé ? Je voudrais vous rencontrer. Si vous êtes d’accord, jouez pour moi le coup suivant.
    
    « Le rencontrer, le rencontrer… Il est marrant, lui ! Pas que ça à foutre. » Je poursuis ma route. Je veux bien jouer une pièce matin et soir, mais pas aller m’enfermer dans une salle, finir à point d’heure. C’est que je ...
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