1. Revenir


    Datte: 19/12/2025, Catégories: #psychologie, #drame, #sciencefiction, #romantisme, #consolation, #regret, #nostalgie, #couplea3, ffh, amour, Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe

    Il fait chaud ce soir. Une chaleur moite qui plaque le drap sur son corps, telle une nappe oubliée. Cette touffeur se communique à ses membres, une sensation que sa peau, après tant d’années d’absence, découvre à nouveau.
    
    Marianne ne dort pas. Depuis plusieurs nuits, elle se réveille en sursaut et ne se rendort plus vraiment. Contrairement à ses cauchemars récurrents, son corps est toujours bien là. Il se rappelle à elle par fragments, revenant à la vie avec lenteur. Parfois une crampe dans le mollet ou un picotement dans la paume. Ou encore un battement étrange, entre les cuisses, comme un souvenir biologique mal recousu.
    
    Ce soir, ce n’est pourtant pas son propre corps qui l’empêche de dormir. C’est celui des autres, en action. Dans la chambre d’à côté, ils font l’amour.
    
    Elle entend les soupirs étouffés, les frottements du matelas et, bien sûr, cet ébranlement irrégulier de la tête de lit contre le mur. Et aussi, l’horripilant silence entre deux vagues, comme un souffle suspendu juste avant qu’il ne s’abandonne. Marc… Avec Juliette.
    
    Elle ferme les yeux, pose ses doigts sur ses tempes. Inspire. Expire. Tente d’oublier. Mais comment oublier, quand tout en elle recommence à ressentir ? Le mur est fin. Elle n’a jamais voulu qu’on isole les pièces. C’était sa maison, sa chambre. Avec, de l’autre côté, la chambre d’amis. Aujourd’hui, celle de Juliette. Installée « provisoirement », depuis six mois. Bien sûr. Provisoirement.
    
    À l’inverse de l’état végétatif promis à ...
    ... Marianne pour le reste de sa vie. Jusqu’à ce que, à la dernière minute, elle soit incluse dans un tout nouveau protocole. Complètement expérimental, lui avait-on dit. Mais elle a accepté quand même. Ils voulaient quelqu’un de bien fracassé, une tétraplégique. Ça avait été sa chance… Ironie mordante.
    
    Elle repense au premier frémissement, à l’hôpital. Une aiguille invisible qui courait le long de sa colonne, comme un serpent électrique. La main du docteur Fischer, qui se voulait rassurante sur son épaule encore insensible.
    
    — Ça commence.
    
    C’était le sixième cycle d’injection. Isomorphic Labs avait prévenu : pas de miracle instantané. Seulement une reconstruction lente et hasardeuse. Comme un immeuble en ruine dont on tente de reformer le souvenir, étage par étage, nerf par nerf. Pour elle, il s’agissait d’un espoir fou, qu’importe comment on l’appelle ! Dans un premier temps, elle avait senti sa nuque et une partie du dos, puis, quelques jours plus tard, ses doigts avaient commencé à bouger, ainsi que ses bras. Ensuite, elle avait retrouvé des sensations dans les hanches, les jambes, puis… tout le reste.
    
    Son autonomie lui a été rendue morceau par morceau, tout comme sa fierté. D’abord la sonde, retirée. Ensuite, le pénible réapprentissage de la marche. Puis elle n’a plus eu besoin d’aide pour se lever ni se mouvoir, ou refaire les gestes du quotidien. Péniblement, bien sûr. Comme une personne recouvrant la liberté, après des années à avoir été séparée de son propre ...
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