1. L'exécution


    Datte: 24/09/2019, Catégories: nonéro, portrait, historique, Auteur: Pierre Siorac, Source: Revebebe

    ... son mari. Wellington promit d’intervenir, mais ne se rendit pas chez le roi. Les historiens prétendent aujourd’hui encore qu’il ne l’a pas fait, renonçant devant la difficulté de la tâche. C’est oublier (mon Dieu, comme cette histoire est pleine d’oublis) que Wellington était un homme de parole, et que son sens de l’honneur était irréprochable. C’est oublier également qu’à l’heure où nous parlons, il était quasiment le maître du pays.
    
    Alors ? Le fait qu’il n’ait pas parlé à Louis XVIII signifie-t-il qu’il ne soit pas intervenu, qu’il ait manqué à sa parole ?
    
    Allan Pinkerton sortit du dossier deux lettres. La première était une lettre de la femme de Michel Ney à sa cousine, chez laquelle l’arrestation avait eu lieu.
    
    La seconde lettre en possession d’Allan Pinkerton émanait du curé de Saint-Sulpice lui même. Elle était assez courte, et provenait des archives de la loge Saint-Jean de Jérusalem.
    
    Si la première lettre pouvait laisser planer un doute quelconque, la seconde – écrite à l’évidence par un franc-maçon – n’en laissait plus aucun. Les « Frères » avaient bel et bien entrepris quelque chose lors de l’exécution du Maréchal Ney. Avaient-ils réussi ?
    
    Une nouvelle pile de témoignages racontant l’exécution était là, à la disposition du détective.
    
    Que de faits bien étranges, pour une exécution qui paraissait si capitale à tout le monde…
    
    Pinkerton frappa violemment du poing sur son bureau :
    
    — Pas de preuves, Peggy ! Pas de preuves !
    — Et pourtant, tout ...
    ... concorde, Monsieur Pinkerton…
    — Non ! Chaque fait, pris séparément, peut être anodin… C’est leur accumulation qui rend cette histoire crédible.
    — En effet, Monsieur.
    — Crédible, certes ; mais pas forcément vraie. Toutes ces accumulations ne pourraient être que des coïncidences.
    — Il y en a beaucoup trop, Monsieur Pinkerton…
    — Soyons rationnels, Peggy. Enfin, essayons de l’être… La lettre de la maréchale ne prouve rien. La lettre du curé prouve qu’il était franc-maçon. Et alors… Que les « Frères » aient pu être impliqués dans cette histoire, à cette époque, la belle affaire !
    — Elle affirme qu’il est parti vers un monde meilleur…
    — Le paradis chrétien.
    — Ou le Nouveau Monde, comme le lui avait conseillé Fouché.
    — Il est écrit « vers un monde meilleur », et non « vers le Nouveau Monde ». Ce qui de toute manière ne constituerait pas une preuve.
    — L’endroit de l’exécution ?
    — Pour éviter tout débordement. Le contre-argument se tient.
    — Les soldats de la Grande Armée ?
    — Un soldat obéit aux ordres. On les voit mal tirer à côté…
    — Sauf si justement on leur a donné cet ordre.
    — Et qui l’affirme ? Un ivrogne !
    — Le coup de grâce, Monsieur Pinkerton ?
    — Un officier peu scrupuleux. Et encore… J’ai une autre lettre qui affirme que le coup a été tiré de loin à cause d’un cavalier anglais qui avait fait cabrer son cheval devant le corps. Non, Peggy, nous n’avons rien de probant.
    — Alors vous n’y croyez pas ?
    — Bien sûr que si, j’y crois : c’est bien là le drame ! Comme ...