1. La mort de Sardanapale


    Datte: 09/09/2019, Catégories: fh, cérébral, pénétratio, Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe

    ... qui lui met les nerfs en pelote. S’y mêlent une envie de pleurer sans cause et un mal-être nauséeux ; il n’y a pas si longtemps, cela s’appelait spleen, et faisait l’objet d’une… coquetterie très mode.
    
    Elle suffoque maintenant et s’inquiète de céder à un étourdissement alors qu’elle se trouve solitaire, aujourd’hui, ici. De son siège, elle se glisse sur le lit tout proche. Elle se heurte au dictionnaire qu’elle y avait abandonné et ne peut dès lors s’empêcher d’y rejoindre l’hypnotique Sardanapale.
    
    Elle s’assourdit des tumultes dont résonne le palais en flamme, des hennissements des chevaux affolés, des pleurs des esclaves affligés. Elle se devine piétinant de riches étoffes éparses, des trésors éparpillés. Ce sont cependant les femmes, uniques taches de lumières, qui accaparent son attention et se révèlent dérisoires colifichets immolés au caprice de celui qu’elles aimaient. Elle les présume, à son unisson, dévastées par des désirs vides de sens, s’évertue à fracturer la bulle des sentiments de la favorite éplorée, presque inconsciente, qui semble partager ses propres vertiges et gît, les bras en croix, aux pieds de son seigneur.
    
    Et puis, inévitablement ses yeux aimantés reviennent se fixer sur cette concubine qui occupe le premier plan à droite de la scène. La tête renversée en arrière, elle perd son regard extatique vers un ciel noir de menaces. Ses narines frémissent, dilatées par les relents du carnage et ses lèvres vermeilles tremblent d’une prière avortée. Sa ...
    ... longue chevelure ébène, que surmonte un riche diadème, cascade en volutes ébouriffées sur une croupe voluptueuse. Nulle marque d’effroi ou de peur n’altère ce beau visage. La jeune femme est totalement dénudée et Laure, assez prude habituellement, lui envie cette audacieuse impudeur. Son corps arqué à la limite de la rupture vibre sous la traction que lui impose la serre griffue d’un farouche janissaire qui tord l’un de ses bras en le tirant dans son dos. Exécuteur des basses œuvres, l’œil luisant du feu qui a enflammé le brasier, il accomplit sa mission sans plus de regret que de remords ou de plaisir.
    
    Laure ressent la tension extrême de la belle splendidement cabrée, de ces chairs heureuses, un brin pulpeuses, de ce ventre offert et de ces seins arrogants tendus vers son souverain effrontément indifférent. Un trouble équivoque l’envahit : elle est éperdue d’admiration pour cette ensellure magnifiquement galbée, ces reins creusés par la fougue du désir et ces fesses charnues si évocatrices des agréments de la vie, emblèmes d’une mûre beauté que sa propre jeunesse lui refuse encore.
    
    Son inspection ensuite l’attarde sur les bijoux sonores et massifs, enchâssés de pierreries qui encerclent chevilles, bras et poignets, symboles d’une fastueuse soumission. Loin de jalouser ce précieux apparat, elle s’en émerveille, remarquant combien il rehausse la vulnérabilité et le mordoré subtil de la peau, la riche maturité de ces formes pleines.
    
    Tout l’incite à se comparer, sinon à ...
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