Atterrissage caliente à Fuerteventura (5)
Datte: 31/08/2019,
Catégories:
Hétéro
Auteur: Nostagique44, Source: Xstory
... champagne, ce sera inutile : je ne bois jamais d’alcool.
— D’accord. Alors ce sera peut-être un café ou un thé ?
— Volontiers, merci.
La beauté d’Air France avait disparu vers l’arrière comme elle était arrivée.
La phase de pré-démarrage du moteur droit se fit entendre durant quelques secondes ; un sifflement d’aspirateur géant prit rapidement de l’ampleur, puis la tuyère vomit un nuage de fumée noire. De ma place, il me semblait sentir l’odeur caractéristique de pétrole brûlé, mais ce n’était que de l’autosuggestion, qu’une illusion car si cela avait été réel, on aurait eu du souci à se faire quant à l’étanchéité de l’appareil ! Or, l’Airbus A319 est un appareil beaucoup plus récent que le Boeing que je pilotais, et sa réputation n’était plus à faire.
Le sifflement du réacteur droit perdit de son intensité. Le copilote avait dû descendre la manette des gaz du côté droit à sa position minimum, jusqu’à la butée de sécurité l’empêchant de passer en position « reverse ». Ce fut le tour du réacteur gauche d’être lancé. La moitié du personnel de cabine – soit une cadre commerciale navigante (CCN) et deux PNC avaient pris place devant moi, sur ma gauche, et avaient bouclé leurs ceintures.
Chantal décrocha le téléphone au-dessus de sa tête, dit quelques mots et le raccrocha.
Un bruit d’hydraulique se fit entendre dans toute la cabine. Je vis sous le bord de fuite de l’aile droite les volets de courbure descendre à quarante-cinq degrés. Sous l’aile gauche, que je ...
... ne voyais pas de ma place, je devinai que ces volets hypersustentateurs – plus connus sous le mot anglais deflaps – avaient eux aussi été abaissés. Au-dessus de l’aile je vis les spoilers (aérofreins) s’élever puis s’abaisser : le pilote était en train de faire les dernières vérifications avant de demander le « repoussage » à Hambourg Ground. Quelques secondes plus tard, une légère secousse ébranla tout l’avion, qui se mit à reculer : un tracteur l’avait accouplé à sa perche et le poussait jusqu’à la position d’où il pourrait se mouvoir seul.
Ce n’est pas souvent que je pouvais assister à ce que les passagers voient et ressentent dans ces moments-là, m’imaginer toutes leurs questions, toutes les inquiétudes qui doivent défiler dans leur tête. Par le hublot, je voyais les « culs » des autres aéronefs encore reliés au bâtiment de l’aérogare par leurs cordons ombilicaux. Bientôt ils seraient comme nous, désolidarisés de la passerelle télescopique et pris en charge par le tracteur qui les repousserait en dehors de l’aire de chargement.
L’avion venait de s’arrêter. De mon oreille habituée aux divers régimes des réacteurs, je perçus une légère montée des sifflements. L’Airbus A319 d’Air France s’ébranla et commença à avancer lentement, puis il prit une voie qui allait le conduire en bout de piste. Je me surpris à constater que, de mes pieds, j’appuyais sur un palonnier imaginaire, enfonçant la pédale pour actionner le frein différentiel qui permettait à l’appareil de tourner ...