55.2 Des grains de sable et des pas de crabe (version HDS).
Datte: 15/08/2019,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Fab75du31, Source: Hds
... détours, tenter l’évitement : mes jambes finissent toujours par me diriger là où le cœur les amène. Je n’ai pas marché une demi-heure que je me retrouve dans la rue de Metz en direction d’Esquirol.
Les dés sont lancés, autant y aller franco : je vais me pointer à la brasserie, et m’installer en terrasse pour prendre un verre. Au fond, j’ai droit. Je m’attends, je me prépare à me faire fulminer du regard : pourvu juste qu’il ne m’ignore pas, et que ce soit bien lui qui vient me servir.
Je sens sa chaînette se dérober entre ma peau et mon t-shirt au gré de mes pas : oui, je vais y aller avec le prétexte de la chaînette, mais je ne vais pas la lui donner pour autant ; je vais juste lui demander de venir la chercher. Je suis à quelques dizaines de pas de la brasserie, je la retire de mon cou, je la glisse dans ma poche. Je m’impose de continuer à avancer vers la terrasse, désormais en vue, alors que le cœur s’emballe mètre après mètre.
Ça y est, je suis devant l’entrée de la terrasse ; mon bobrun est là, jeans marron et t-shirt noir bien ajusté, craquant à souhait. Il est en train de servir des clients ; lorsqu’il finit de vider son plateau, il débarrasse une table voisine ; puis, il se retourne pour répartir ; c’est là que son regard capte ma présence ; le bogoss semble surpris, mais il fait mine de m’ignorer et il disparaît avec son plateau.
Sur le coup, j’ai presque envie de me tirer ; puis, je me dis que désormais je suis là, alors il faut y aller : de plus, il ...
... n’y a pas encore grand monde en terrasse à cette heure, c’est le bon moment pour l’« affronter ».
Je repère une table un peu isolée et je m’y installe. Jérém revient avec un plateau chargé. Lorsqu’il repère ma position, exit le sourire incendiaire de dimanche, son regard est noir, orageux.
Apparemment, le bobrun est seul au service pour l’instant ; il ne pourra pas m’ignorer, il sera obligé de venir me voir. Le bogoss disparaît de nouveau à l’intérieur ; mon cœur continue à s’emballer de seconde en seconde en attendant qu’il revienne.
Lorsqu’il réapparait, il fonce directement sur moi ; on dirait un jeune taureau en train de charger.
« Qu’est-ce que tu fais là ? » il me lance sèchement, sans préliminaires.
« Bonjour Jérém… j’ai envie d’une bière blanche… ».
« Tu peux pas t’en acheter à la superette ? » fait-il, l’air agacé.
« La superette ne fournit pas le serveur avec… ».
« Tu veux quoi, tu vois pas que je bosse ? ».
« Je sais… mais comme tu ne viens plus me voir à la pause, je viens prendre des nouvelles… ».
« C’est pas le moment… ».
« Tu pourrais au moins répondre à mes messages ! ».
« J’ai pas le temps… ».
« Des conneries ! ».
« T’as ramené ma chaîne ? » fait-il froidement.
« Non, elle est à la maison… ».
« Tu fais chier ! ».
« Passe demain, je te la donnerai… ».
« Je t’ai dit que je n’ai pas le temps ! ».
« T’as plus de pauses ou quoi ? ».
« Ne me casse pas les couilles, Nico, et ramène-la-moi ! ».
« Ok, je ne ...