1. Les seins honorés


    Datte: 12/08/2019, Catégories: hplusag, ascendant, cérébral, Voyeur / Exhib / Nudisme nonéro, mélo, Auteur: Bertrand D, Source: Revebebe

    ... sol de son sang.
    
    Un cauchemar, c’est un cauchemar. Je me suis entortillé dans les draps, je suis coincé et ça me fait mal, très mal.
    
    Jacques entrouvre les paupières, ébloui par la blancheur des murs. Pas moyen de bouger, je suis coincé.
    
    Tout à coup, le rugissement des pneus bloqués lui revient aux oreilles. Il s’est fait ramasser par une voiture. Hélène ! Ah non, elle avait déjà traversé, Colette ! Elle était derrière. Ce n’est pas trop grave, je suis le seul à avoir dérouillé. Et il replonge dans le noir.
    
    Un murmure de voix le tire de sa léthargie.
    
    — Ça y est, il se réveille. Comment vas-tu, Papa ? murmure Régis.
    
    Un gargouillement lui répond, pas moyen d’ouvrir les lèvres.
    
    — Reste calme, tu es sorti d’affaire, nous sommes là.
    
    Autour du lit, ses trois enfants. Ils se sont sapés, pense-t-il. Quelle idée de se mettre en costume pour venir à l’hôpital. Mais Colette n’est pas avec eux ? En tombant elle a dû se faire mal. Dès qu’elle sera remise, elle viendra.
    
    Depuis trois jours qu’il a repris connaissance, son corps n’est que souffrance, mais il est l’objet de toutes les attentions, de toutes sortes de soins. Le professeur lui a expliqué que le choc lui avait abîmé le côté droit du corps, il était retombé sur le côté gauche, se fracturant l’omoplate et la mâchoire qu’on a dû immobiliser. Il n’a pu qu’acquiescer à ses explications, pas moyen de s’exprimer. On le prend, le tourne, l’amène pour les soins, la radio, ça n’en finit pas. Heureusement il a la ...
    ... visite des enfants tous les soirs, c’est bon d’avoir une grande famille. Et, même à midi, Christine, qui travaille dans le voisinage, mange rapidement puis vient lui tenir compagnie un moment. Personne ne lui parle de l’état de santé de Colette et il ne parvient pas à le leur demander. Aujourd’hui, quand Christine lui a pris la main, il a appointé trois doigts joints pour lui faire comprendre qu’il voulait écrire. Bien qu’il ait le bras blessé, il peut un peu bouger les doigts. Elle a compris, lui met son stylo entre les phalanges, la main reposant sur une feuille de papier. Il essaie de tracer le nom de sa femme, mais ne parvient qu’à esquisser Un C puis un O. La douleur est trop vive, il lâche tout. Christine a regardé le papier, a levé les yeux vers lui. À sa mine fermée, il croit comprendre soudain. Il grogne, réclame le crayon. Elle lui remet en main, il trace une croix. Sur le visage de sa belle-fille coulent deux larmes : il a compris, elle est morte. Et l’autre jour, ils revenaient de l’enterrement ! Voilà pourquoi ils étaient endimanchés ! Il a fermé les yeux, verrouillé les écoutilles. Plus rien ne compte, lui infirme et surtout Colette morte. Plus la peine de vivre.
    
    Les infirmières ne bougent plus qu’un cadavre. Les médecins lui parlent sans provoquer aucune réaction. Il n’ouvre même pas les yeux lorsque les enfants viennent et lui parlent. Il attend la mort. Christine à midi, ses enfants le soir, viennent à son chevet. Il entend des voix, mais ne s’intéresse ...
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