1. Lucie in the sky


    Datte: 08/08/2019, Catégories: fhhh, hbi, inconnu, copains, boitenuit, noculotte, Oral fgode, hsodo, champagne, exercice, occasion, Auteur: Bordaldea, Source: Revebebe

    C’est chez Mo que le feu enflamma la nuit. Nico et Paul avaient lâché l’éponge. Éric, plus gaillard, m’avait soutenu de bord en bord, jusque chez Mo.
    
    Dans cette boîte incongrue, nichée au rez-de-chaussée d’un immeuble bourgeois dans un quartier idoine, nous enterrions les nuits, à ce moment où la conscience, exilée enfin dans la réalité, n’attend plus grand-chose. Ce qui nous poussait montait du fond des entrailles, évitant toute connexion directe avec les synapses. Comme si le sang commandait au sang, la chair à la chair. Se finir chez Mo tenait du rituel sacrificiel. Dans cette atmosphère délétère, moite et odoriférante, l’électricité des fantasmes crépitait drue. Cosmétiques et sueur formaient une gangue épaisse, palpable, qui aiguisait les appétits. À touche-touche, les yeux se dévoraient. Et faussement se dérobaient. Fossoyeurs de la nuit, nous embaumions la tentation. Sur la frontière indécise d’un entre-deux, ivres morts souvent, nous nous tenions pour initiés : subtiles complexions de sens et de nerfs, phéromones en éveil.
    
    Il suffit de peu pour que tout bascule. Pour que le regard un peu long que vous échangiez avec une fille, à la fois distrait et interrogateur, dérive vers un sourire explicite, une invite dans les yeux. Fascinante dérive. À l’époque, pas grand-chose à faire d’autre pour remplir nos vies. Aucune journée pour nous satisfaire vraiment ! Mais tard dans la nuit, la faille s’ouvrait. Sur le fil du rasoir, nos pas de funambules entamaient la gigue ...
    ... nocturne. C’était notre messe des fous, notre cavalcade : saoulés de lumières artificielles, éphémères impatients voletant, tournoyant autour de qui portait jupon. Pour ce peu de rien : sentir exploser dans la chair l’adrénaline qu’une pâle journée avait comprimée le jour durant. Elle irradiait d’un coup. Sur un regard, un frôlement plus appuyés. Conscience derrière la conscience.
    
    Éric ne dansait pas. Observez un mec qui joue de l’harmonica. C’est rarement un danseur. Il se tient droit, roide presque, son instrument qu’il avale, qu’on devine à peine derrière ses doigts réunis en corbeille. Nul ne sait s’il veut, derrière ses doigts, exalter la musique ou la retenir, la contenir pour la livrer plus puissante. Parfois, les doigts s’ouvrent pour une envolée plus tonitruante, sonore, évadée. Mais l’harmoniciste a la musique intérieure. Peut-être l’instrument qui fait ça, si insignifiant, si dérisoire, si prêt d’être confondu avec rien… avec ses doigts qu’il suçoterait pour en tirer de la musique. Éric, à l’image de ses semblables, ne dansait pas sinon d’un rythme contenu, intérieur. Éric tenait le bar, me regardant danser.
    
    Je ne dansais pas comme eux. Dans ces années 80, la New Wave nous était tombée dessus, avec son fatras de Gothic, Dracula blafards, tous poils hérissés, l’œil cerné de bistre et de khôl. Musique aux vagues ondulations : les bras des gothics mimaient le flux et le reflux des marées. Éric avait la musique intérieure. J’avais mon rythme, tout aussi intérieur, ...
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