1. La rencontre


    Datte: 06/07/2025, Catégories: fh, Collègues / Travail amour, rencontre, Auteur: Roy Suffer, Source: Revebebe

    ... habitat en dur. Si la mienne était bien celle du bailli, comme on le dit, on va dire XIIe ou XIIIe.
    — Mon Dieu ! Elle aurait donc au moins huit siècles ! Incroyable…
    — Non, non, pas si incroyable quand on y fait des travaux. Voyez, cette partie-là, à gauche, avec le garage et une pièce au-dessus ? Elle a dû être rapportée ultérieurement. Il n’y avait pas de communication entre les deux et les planchers ne sont pas au même niveau. Ce qui met mon entrée au fin fond d’une étroite courette.
    — Et elle servait à quoi ?
    — Si j’en crois les pierres d’angles qui sont restées autour de la porte, ce devait être une grange, possiblement là où l’on remisait charrette et chevaux avec le grenier pour le foin et le larbin qui s’en occupait.
    — D’accord ! Et ce petit balcon avec son pilier de pierres, c’est superbe. Ce pourrait être celui de Roméo et Juliette.
    — Ha ha ! Très romantique, j’avoue. On continue la visite par l’extérieur ?
    — Si vous voulez…
    — On va prendre ce raidillon, enregistré comme rue… ! Un premier perron qui donne donc au-dessus du garage, pour moi le logement du cocher… et puis un second perron avec moins de marches qui donne dans ma pièce à vivre. Et l’on arrive à l’angle, avec encore une ruelle minuscule qui passe derrière. Mais là, je touche le toit à la main, alors que devant il y a deux étages.
    — Je me répète mais c’est vraiment in-croy-able ! Quelle architecture tortueuse ! Mais pourquoi enterrer ces maisons ainsi ? Je pensais que la maison du bailli ...
    ... ressemblerait à un hôtel particulier, ou quelque chose dans le genre.
    — C’est toute cette partie de « ville haute » qui est ainsi conçue. Des maisons serrées les unes contre les autres, au pied de l’ancienne forteresse, des ruelles faciles à défendre et puis une solution simple et écologique que les anciens connaissaient bien : enterrée sur les deux tiers, la maison est naturellement climatisée par la terre, comme une cave. Fraîche en été et tempérée l’hiver.
    — Ah ! Malin ! Et ça fonctionne encore aujourd’hui ?
    — Oui, un peu. Même certainement mieux qu’à l’époque avec nos isolations et nos doubles vitrages. Cependant, notre besoin de confort a aussi évolué : quand je travaille assis toute une journée sur un bouquin, en dessous de dix-huit, j’ai vite froid.
    — Alors ? Comment faites-vous ?
    — Je monte à l’étage où j’ai gardé la grande cheminée et je me fais une bonne flambée. Je vais souvent traîner dans les bois l’hiver, et j’y exerce mon droit d’affouage qui, comme le glanage, date du moyen-âge. Normal quand on habite une maison de l’époque. C’est le droit de couper du bois pour se chauffer, il suffit de demander à la mairie. Passons à l’intérieur… Voici l’entrée qui me sert également de bureau.
    — Mais c’est charmant… tout comme l’extérieur. Ce carrelage, cet escalier… c’est d’époque ? Dans son jus ?
    — Non, pas du tout, de la récup’. Quand on n’a que ça à faire… D’ailleurs, presque tout ici provient de récupération : démolitions, déchetteries, Emmaüs… Je rapporte, je démonte, ...
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