Aveugle - Histoires de Sexe

Aveugle

... apparu. Je venais de mettre en balance ma jouissance et l’amour que je porte à l’homme qui partage ma vie. Et cette idée avait immédiatement fait tomber la tension de ce moment de délice.

Mais aussi, j’ai eu peur de la femme qui venait de naître entre ses bras. Une femme privée de liberté qui a perdu son libre arbitre. Un réflexe de survie ? Le fait d’être privée de la vue m’avait fait perdre toute référence et avait stimulé d’autant mes capacités de jugement et de discernement.

Je veux me dégager pour me relever et partir, fuir ce lieu de débauche. Ma volonté et ma décision semblent inébranlables. Je vais même jusqu’à retrouver mon image de femme épanouie, heureuse et à l’abri d’une telle déchéance liée au sexe et à son emprise sur ma dignité. Je suis de nouveau libre et responsable de ma vie.

Mais c’est sans compter sur l’intelligence diabolique de cet homme. Impassible, il me laisse enlever mon bandeau. C’est alors un choc pour moi de le voir, accroupi entre mes jambes, dans une position si dégradante.

Comprenant ce que je viens de faire, il braque ses yeux éteints sur les miens.

— Ne vous méprenez pas, Chantal, je suis bien à vos pieds, soumis à mon envie de vous. Un mot et je me retire et notre aventure restera ce qu’elle a été. Je ne crois pas vous avoir obligée à quoi que ce soit. Mais maintenant je suis votre obligé. Jamais je ne me serais cru capable de tels sentiments pour une femme. Jamais.

J’écoute ses mots, troublée sans que ma détermination ...

... ne faiblisse pour autant. Il s’en est rendu compte, car lentement il s’est mis debout devant moi.

— Vous pouvez me voir nu, Chantal. C’est votre privilège. Pas le mien.

Il m’a tendu la main pour que je me lève à mon tour du fauteuil. Il m’a placée face à lui avant de me demander :

— M’accorderez-vous une faveur ?
— Bien entendu, lui réponds-je spontanément, trop vite encore une fois.
— Je voudrais que vous me laissiez vous remettre le bandeau, enleviez vos chaussures et que nous faisions quelques pas ensemble dans le salon.

Je ne comprends pas où il veut en venir, mais je ne peux lui refuser cette faveur bien innocente.

Il me prend la main gauche, se tourne et la pose sur son épaule gauche. Je lui emboîte le pas, circonspecte.

— Laissez-vous guider sans crainte. Faites-moi entière confiance.

Les premiers pas que nous faisons sont hésitants pour moi, privée de la vue. Puis, petit à petit, je me sens en sécurité confortée par les mouvements de son corps transmis par ma main sur son épaule. Mes pieds nus sur le parquet de la pièce rythment mes mouvements en harmonie avec les siens. Ce contact ajoute de surcroît une note sensuelle délicieuse. Tous les deux privés de nos yeux, toutes les cellules nerveuses de nos corps communient dans une catharsis commune. Je me rends compte que nous ne faisons qu’un et je comprends pourquoi il a voulu que mes pieds aussi soient nus, comme les siens.

Nous faisons plusieurs fois le tour du salon sans aucun faux pas. Sans ...