1. La nuit électrique


    Datte: 29/03/2024, Catégories: ff, asie, voiture, autostop, caresses, Oral 69, fdanus, occasion, lesbos, Auteur: Come Sorel, Source: Revebebe

    ... lui colle sur le corps, un short en jean, des chaussures de toile.
    
    Dans l’air chaud et sec d’une fin de journée d’été, dans l’odeur de blé vert cuit au soleil qui monte des champs céréaliers qui entourent l’aire de service, dans la lumière rasante et orangée, sans trop savoir pourquoi, la conductrice s’approche de la jeune fille.
    
    — Tu veux une clope ?
    
    Oui, elle veut bien. Elle sourit.
    
    — Ils habitent oùtes vieux ? Elle imite l’ironie.
    — Cannes.
    — C’est sur ma route. Viens. Un temps. Si tu veux.
    — Ben ouais j’veux, répond la jeune fille en soufflant la fumée de sa cigarette, un sourire aux lèvres, les yeux rieurs. Effrontée. Moi, c’est Mathilde.
    
    22 h 30
    
    Dans la voiture, c’est Mathilde qui raconte. Le copain d’un copain qui propose de l’emmener à Cannes, elle doit voir ses parents, mais l’autre con pense qu’en échange elle voudra bien visiter l’arrière du van. Et ce n’est pas qu’elle soit contre les galipettes (ça fait sourire la conductrice, ce mot un peu ridicule : « galipette »), mais pas avec lui : trop moche, trop poilu, trop con, et pas en échange de quelque chose, « si on doit baiser, alors il faut que ce soit joyeux, doux et fort, mais là, c’était trop nul, trop prévisible ». Il a voulu la forcer un peu, lui a mis la main au cul. D’où la claque.
    
    Puis la conversation, vive, un ruisseau en montagne, la vie de Mathilde, étudiante ratée, serveuse à temps plein dans un bar un peu glauque des Chartrons, un truc punk mais surtout crade, une vie assez ...
    ... cool quand même, pas cool non, mais indépendante.
    
    Mais pas d’études, ce qui fait enrager son père, unconnard, sûr de lui, dominateur, absolument bourgeois, et ce qui angoisse sa mère, petite femme vietnamienne, timide, angoissée par la pauvreté qu’elle a connue enfant, oiseau un peu fébrile.
    
    Elle rentre chez eux. Pour voir sa mère. Ça la fait chier, mais elle doit bien rentrer de temps en temps, non ?
    
    C’est Monk que l’on entend maintenant.Alone in San francisco. Cela va bien avec la façon qu’à Mathilde de parler, des phrases vives, de l’humour, des ellipses. Des silences.
    
    Puis la conductrice.
    
    Enfance à Bordeaux, milieu populaire, un père ouvrier, mère au foyer. De belles études malgré tout.
    
    Avocate, deux enfants, adorables évidemment. Un mari, italien, un peu absent. De l’argent. Une vie agréable, douce, reposante. Elle rêvait d’aventures évidemment, de plaidoiries en Cour d’Assises et d’une ferme à rénover, au lieu de cela, elle fait du droit de la propriété intellectuelle et vit dans un appartement haussmannien.
    
    Un rien d’ennui que compensent des week-ends à Arcachon et la piscine de la maison en Ligurie.
    
    Un ennui profond en fait, mais ça, elle ne le dit pas.
    
    La littérature ensuite, parce que sur la plage arrière, la conductrice à emmené les livres qu’elle veut lire cet été. Mathilde qui n’aime que les Russes et les modernes, qui aime Ulysse par-dessus tout et Dostoïevski évidemment. La conductrice qui préfère les romans français, Balzac, Stendhal et ...
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