Modèle de femme
Datte: 30/01/2024,
Catégories:
fh,
complexe,
école,
amour,
cérébral,
Voyeur / Exhib / Nudisme
nonéro,
portrait,
rencontre,
Auteur: Mlle Fanchette, Source: Revebebe
... observateur quand il veut. Son travail est si fluide et vaporeux qu’il en devient abstrait, comme si une forme éthérée avait laissé son empreinte sur le papier.
— C’est parfait, Pierre.
— Alors, je m’arrête là, répond-il, l’œil pétillant.
Je reprends mon dessin. Je ne joue pas dans la même cour que mes voisins, mais c’est déjà pas mal. Les minutes s’égrènent paresseusement dans le silence. Garance se contorsionne derrière l’un ou l’autre pour essayer d’avoir le point de vue le plus proche possible de celui du dessinateur et commente à voix basse : les proportions ; la tête est un peu petite ; les jambes n’ont pas la même largeur ; attention aux raccourcis ; il faut le faire moins long…
— Il reste un quart d’heure ! annonce-t-elle en levant le nez.
Je jette un regard alentour. Malgré ses difficultés à marcher, Jackie est toujours sur ses deux jambes, appuyée d’une main sur la table à jouer avec ses pinceaux sur le kraft. J’aperçois Annette en train de ranger ses affaires… Elle qui se plaint toujours des poses qui sont trop courtes, pour une fois qu’il y a une rallonge elle part avant la fin ! Elle n’est pas seule à discrètement remballer, ils sont au moins deux autres. Charles fronce plus les sourcils qu’à l’ordinaire, il s’avachit un peu plus. Il faut dire qu’il se place toujours dans l’angle le plus complexe à saisir : là, il a tout le corps d’Olga en raccourci. Fred se pince l’arête du nez en plissant les yeux, le stylet de sa tablette coincé entre les doigts. ...
... Seuls Hilke et Aurélien semblent toujours aussi concentrés. Ces deux-là sont toujours les derniers à s’arrêter.
Un courant d’air me fait tourner la tête vers la porte. Annette est allée rincer son matériel. Un léger brouhaha se forme peu à peu dans la pièce alors que certains décrochent. La porte est ouverte et fermée de plus en plus souvent, les uns et les autres s’excusent en partant.
Ça fait partie du jeu, mais c’est l’une des pires choses à faire vis-à-vis du modèle, d’autant que Garance a décalé la pause pour ceux qui voulaient partir plus tôt. Qu’est-ce que ça peut m’énerver ce genre de choses ! Surtout pour Olga qui est dos à la salle et ne sait donc même pas s’il reste quelqu’un pour dessiner. Elle est juste soumise aux courants d’air glacés en se demandant si par hasard on ne l’aurait pas oubliée… La pauvre qui n’avait déjà pas chaud commence à trembler alors que son dos se marbre légèrement.
Je jette un œil à l’horloge. En théorie, il reste un peu plus de cinq minutes. Garance l’a remarqué aussi.
— C’est bon pour tout le monde si on arrête là ? demande-t-elle.
Les deux irréductibles s’activent derrière leur chevalet pour finir, mais bientôt, Olga peut se relever et aller se mettre au chaud. Manquerait plus qu’elle attrape froid en plus de ses ennuis avec son directeur d’étude et ses amours chaotiques…
Une main chaude se pose sur mon bras, attirant mon attention vers Yvan.
— Quelque chose ne va pas ? me demande-t-il.
— Non, c’est bon, t’inquiète ...