Tout se joue le 18 juin. - Histoires de Sexe

Tout se joue le 18 juin.

... trop réduite, il faudrait envoyer environ deux cent chevaux légers en éclaireurs. Plus, serait trop, mais s’ils doivent livrer bataille avant notre arrivée, ils pourront tenir en attendant notre aide.

L’idée en séduit plus d’un, mais suivre les ordres d’une femme qui plus est à peine pubère… Il y eut quelques protestations, face auxquelles le capitaine La Hire, ancien brigand au sang chaud, s’énerva :

— Par D… mon épée, jura-t-il en lançant un regard à Jeanne. N’est-il pas possible de prendre une décision sensée ?

Plus calmement, Ambroise de Loré abonda dans son sens :

— Elle a été choisie par Saint-Michel, Sainte-Catherine et Sainte-Marguerite, la Foi commande de la suivre aveuglément.

Jean d’Alençon intervint à son tour pour calmer les esprits et rallier le plan de la pucelle. Cinq capitaines précéderaient donc l’armée le lendemain, jour de la Saint Amand : Gauvain, La Hire, le sire de Loré, le connétable de Richemont et Ponton de Xaintrailles.

La séance fut enfin levée au grand soulagement de Gauvain. Alors que les chevaliers quittaient le pavillon de commandement, Jeanne le retint. Elle attendit qu’ils soient seuls avant d’affirmer :

— Tu es un homme précieux Gauvain. Dès le premier instant, tu as pris mon parti, pris la tête de l’escorte qui m’a accompagnée à Chinon et m’a enseigné les bases du maniement de l’épée. Tu es d’une loyauté sans faille et d’un courage sans limite…

Elle se tut, songeuse. Gauvain leva un sourcil et attendit.

— Mais ? ...

... Interrogea-t-il après un moment.
— Je sais ton allégeance partagée.
— Que veux-tu dire ?
— À qui est l’anneau pendu en permanence à ton cou ? Tu l’as fait ajouter en pointe de ton blason et tu l’embrasses avant chaque combat comme j’embrasse la Sainte-Croix.

Machinalement, il porta la main sur son cœur pour sentir à travers l’étoffe le poids familier du bijou.

— Jeanne, que veux-tu ? Éluda-t-il. Pourquoi m’interroger sur elle ? Pourquoi maintenant ?
— Tu t’entoures de trop de secrets pour ne pas intriguer, Gauvain, surtout en temps de guerre. Mais, je sais que je n’aurai pas les réponses. Pourtant, les langues s’agitent dans le camp… On te dit protégé par une nymphe païenne, une fée des brumes, est-ce vrai ?

Il conserva lèvres closes, refusant de confirmer ou d’infirmer les dires de son interlocutrice qui poursuivit :

— Étrangement, tu sers sous la bannière d’une pucelle chrétienne. Tu vas même jusqu’à lui offrir un soutien inconditionnel. Nous sommes deux femmes dans ta vie… Tôt ou tard, il ne pourra en rester qu’une. Je t’offre pour ma part la Vraie Foi et la Gloire. Celle de rendre au dauphin Charles sa couronne et son royaume selon la volonté du Très Haut. De la guerre et du sang. Mais, je devine que ce n’est pas ce que tu recherches… Alors, puisque ton choix est fait, pourquoi es-tu encore ici ?

Il hésita un instant puis souffla :

— Thibault.

Jeanne eut l’un de ses rares sourires, de ceux qui rappelaient combien elle était jeune encore malgré sa ...