1. Fade incandescence


    Datte: 22/06/2019, Catégories: fh, hplusag, hagé, douche, cérébral, revede, délire, Auteur: Collectif Antilogies, Source: Revebebe

    ... Rapidement, ça a commencé à me bouffer la tête.
    
    Mais chez moi, je ne m’ennuyais plus : je passais mon temps à me documenter, pour construire mon récit, en gommer les incohérences. Cela dit, je n’étais pas non plus parti de rien ; je connaissais déjà un certain nombre des ressorts de nos âmes complexes pour élaborer une trame qui tenait debout : éducation parentale stricte, devoir d’excellence, angoisse face à l’échec, pression constante, impuissance, angoisses, tentation de l’alcool. Mes récits le tenaient en haleine. Ou bien était-ce moi, qui prenais plaisir à découvrir l’histoire que je tricotais fiévreusement ? Peu importe. Je me couchais tard, pour construire et apprendre cette histoire dont j’étais le héros.
    
    Je me suis inventé des liaisons, de multiples liaisons. Beaucoup sans lendemain, par peur de l’engagement, de la réussite, en appliquant une méticuleuse stratégie de l’échec. Et le psy me posait des questions qui allaient dans ce sens ; parfois, il m’offrait même sur un plateau des pistes inexplorées. Je n’avais qu’à me laisser guider par ses intuitions pour broder autour. Deux séances par semaine, ça me coûtait de l’argent, pas mal d’argent, je n’ai jamais calculé combien, au juste, mais les fins de mois étaient difficiles.
    
    Je lui racontais ce qui pouvait, ce qui aurait pu être, mais n’était pas. N’est toujours pas, d’ailleurs, et ne sera sans doute jamais. Mais, d’une certaine manière, je vivais une vie. Je me suis inventé une autre famille : un père, ...
    ... véritable connard, avec qui je ne me suis, en plus de trente ans, jamais entendu ; une mère absente, diaphane et volage ; et une jeune sœur avec qui j’entretenais depuis aussi loin que remonte ma mémoire des relations troubles. Je n’ai ni frère ni sœur, dans la réalité, et je me félicite d’avoir pu si bien rendre le vécu d’une relation frère/sœur de la sorte. Quant à mes parents, ils ont toujours été du genre aimants, pas trop présents, pas idéaux non plus, mais ils ont de tous temps fait de leur mieux. Ce n’était pas eux que j’avais envie de raconter. Je l’ai vu tiquer, en parlant de la fois où j’avais fouillé dans les affaires de ma sœur. Je ne voulais pas dire le mot, je l’ai laissé faire, ça n’a pas été sans peine.
    
    Inceste.
    
    Une fois formulé, il m’a empli d’un trouble incroyable.
    
    J’ai embrayé sur l’idée, forgeant, et l’image de mes maîtresses afin qu’elle concorde avec celle de ma sœur, du moins dans les caractéristiques que je retenais en elle. Je me suis bien vite fait déborder par ma libido : j’y ai impliqué les deux collègues sur lesquelles je fantasme depuis mon arrivée, Marie et Kahina. J’ai laissé planer le doute en le noyant sous des questionnements de puceau : avaient-elles envie de moi ? Marie n’était-elle pas plus ou moins secrètement amoureuse de moi ? Mon narcissisme n’était pas en reste : ce connard de Bertrand, du contentieux, ne me jalousait-il pas d’avoir débloqué le dossier Durocher sans son aide ? Et dans ce cas, pourquoi ne trouvais-je pas la force ...
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