Les Parques 4/8 - Histoires de Sexe

Les Parques 4/8

... œuvre d’art à 200 000 dollars, un artiste devrait d’abord prouver son excellence par un « Chef-d’œuvre". Et vous, vous, vous avez un des trois « Chefs-d’œuvre » de Souxe ?

Confuse, Amélie répond à voix basse :

— Oui… et non, …, en fait,… c’est… le quatrième !
— Le quatrième, mais je…
— Personne ne connaît son existence. Les trois premiers, il les peint au tout début de sa carrière, avant sa première expo. Mais le quatrième, il l’a peint il y a quinze ans : il avait soixante-quinze ans,… et moi dix-neuf. Personne, à part moi, ne l’a jamais vu, enfin si, une personne, mais bon… il m’est… très… personnel… si vous voyez ce que je veux dire…

Après un bref silence, Ladrime acquiesce.

— Oui, je… vois. J’imagine, ajoute-t-il doucement en considérant la jeune femme de la tête aux pieds. Enfermé dans un coffre…
— Non, non, il est au-dessus de mon lit. Mais vous êtes quasiment la première personne à mettre les pieds dans cet appart depuis un an que j’y habite.
— À part votre… petit ami, j’imagine ?
— Oh non (la jeune femme rit), lui, il croit que j’habite un petit trois-pièces sordide et sombre en colocation avec une collègue de cinquante balais, obèse et moustachue ! Et c’est tant mieux !

Redevenant sérieuse, elle ajoute :

— Cela dit, je ne vous ai pas amené ici pour vous conduire dans ma chambre…

Antonin Ladrime ne serait pas contre cette éventualité, mais l’heure n’est pas à la gaudriole.

— Oui, c’est vrai, c’est vrai, convient-il un peu penaud. Alors ...

... maintenant, allez-y, dites-moi tout.

S’approchant du grand tableau, la jeune décroche l’immense toile et la pose au sol. Ladrime effaré découvre des photos scotchées au mur. Six photos de femmes, nommées et numérotées de 8 à 13, auxquelles s’ajoutent, au-dessous, sept simples morceaux de carton blanc, mais également nommés et numérotés, de 1 à 7. La dernière photo de femme, le numéro 13, est celle d’Amélie. Et surtout, au-dessus des deux rangées de photos, il voit la photo d’un homme qu’il reconnaît immédiatement.

— Veillefonds !! Mais qu’est-ce… ?
— Je vais vous expliquer.

La jeune femme est pâle, livide même.

— Avant tout, sachez que je ne suis en rien responsable de la mort de ce salaud, même si j’ai rêvé mille fois de le zigouiller depuis six mois. Vous me croyez ? Non, peut-être pas encore, mais ça viendra,… enfin je l’espère !

La jeune femme est quasi chancelante, visiblement très atteinte nerveusement. Après une longue respiration, elle reprend la parole :

— Bon, je vous explique : vous vous rappelez mon accident, il y a sept mois ?

Bien sûr qu’il s’en souvient ! Il avait eu tellement peur alors ! Peur de la perdre !

Alors qu’elle faisait son jogging, tôt le matin, dans le bois de Bucy, Amélie avait été violemment heurtée par un quad. Projetée à plusieurs mètres, elle était retombée lourdement sur un rocher. Résultat : grave traumatisme crânien, gros œdème sous-dural qui avait entraîné un coma de dix-sept jours, à l’issue duquel elle s’était ...