1. Mademoiselle Colette


    Datte: 30/04/2019, Catégories: fh, hagé, fagée, Collègues / Travail portrait, Auteur: LouVilneau, Source: Revebebe

    ... ne pas toujours être aussi coopérative qu’elle le pourrait, mais ce n’est pas important. Je me mets à sa place, je viens un peu envahir son territoire et bouleverser ses habitudes.
    — Tu sais que c’est une femme formidable. Elle est là depuis le début, il y a trente ans. Engagée comme simple secrétaire, elle a appris tous les rouages de l’entreprise et s’est rendue indispensable. Je dois t’avouer que si elle n’était pas là, plus rien ne tournerait correctement. Depuis qu’elle a perdu sa maman, il y a six ans, elle ne vit plus que pour l’entreprise. Au début, j’ai cru qu’elle était amoureuse de moi – tu sais, le schéma classique de la secrétaire amoureuse du patron – mais non ! C’est l’entreprise qu’elle aime, pas moi. Tu connais la jalousie d’Édith, eh bien elle ne m’a jamais fait une seule remarque à propos de Colette : c’est révélateur !
    — Excuse-moi, c’est de la curiosité pure mais, quel âge a-t-elle ?
    — Bah, ce n’est pas un secret, elle a 53 ans et, à ma connaissance, il n’y a jamais eu d’homme dans sa vie. Tant qu’elle était vivante, sa mère – une femme possessive et égoïste – a toujours fait barrage aux hommes qui auraient pu s’intéresser à elle. Depuis son décès, Colette s’est « mariée » avec l’entreprise. Peut-être qu’elle se trouve trop laide ou trop vieille pour chercher ?
    — Elle a bien tort ! Si elle s’arrangeait un peu, ce serait une belle femme.
    — Tu as sans doute raison, mais je ne l’ai jamais vue comme une femme. C’est peut-être idiot, mais c’est vrai ! ...
    ... La prochaine fois, je vais essayer de la regarder…
    — En tout cas, je t’en prie, ne lui parle pas de notre conversation. Je veux l’apprivoiser moi-même. Ça va être long, je sais mais je ne veux surtout pas qu’elle se sente obligée. Pour le boulot, tu es là pour me fournir tous les renseignements dont j’aurai besoin et puis, je commence à connaître les rouages de la boîte.
    — OK, je te fais confiance. Persévérant comme tu es, je suis certain que tu parviendras à travailler en harmonie avec elle. Au fait, j’allais oublier, Édith m’a demandé de t’inviter pour un petit repas tout simple entre amis, samedi soir. Est-ce que tu es libre ?
    — Oui, samedi soir je n’ai rien de prévu. Ça va me faire plaisir de revoir ta femme, depuis tout ce temps.
    
    – oooOOooo –
    
    – oooOOooo –
    
    Empêtré avec son bouquet et son cadeau, Laurent erre dans les couloirs de la maternité à la recherche de la chambre 114. Une aide-soignante hilare, mais gentille, lui explique le chemin. Il toque enfin à la porte :
    
    — Entrez ! … Oh, mais c’est monsieur Laurent ; comme c’est gentil.
    
    Il embrasse la jeune maman, rayonnante, et serre la main de Louis qui s’est levé pour l’accueillir.
    
    — Mon Loulou, veux-tu aller au bout du couloir, au bureau, pour demander un vase ? Tu seras un ange.
    
    Elle pose les fleurs, prend le paquet et, comme une enfant à Noël, déchire le papier qui l’enveloppe tout en jetant des petits coups d’œil rieurs sur Laurent.
    
    — Asseyez-vous… Oh, la belle grenouillère, qu’elle est belle ...
«1234...11»