1. Sombres excitations


    Datte: 21/02/2018, Catégories: f, revede, Auteur: Rosa Thurner, Source: Revebebe

    Croire en Dieu ne signifiait rien pour elle. Si cette entité d’énergie positive, comme négative, suscitait l’agitation humaine pour déterminer dans la vie de chacun ce qui était le bien par rapport au mal, elle n’y adhérait en aucun cas. Mais comme pour beaucoup de monde, c’était certainement pour se déculpabiliser. Si même Dieu pouvait faire le mal, il fallait donc admettre qu’en chacun d’entre nous, il existait bien une face obscure avec laquelle il fallait se construire et apprendre à vivre.
    
    Convention, certitude, résignation et travail sur soi ne faisaient donc plus partie de son vocabulaire depuis lui, lui qui depuis quinze ans faisait de courtes incursions dans sa vie, et dont elle avait tant de mal à se passer. Elle ne pouvait véritablement expliquer ses propres envies, ni pourquoi elles existaient ni comment elles subsistaient après tant d’années mais elles étaient là, forces motrices de ses pensées et motivations.
    
    Quel dommage en somme que ses envies n’allaient pas dans le sens de ses objectifs, que la vie consciente et sociale avait tracés pour elle durant toutes ses années !
    
    Elle lui écrivait donc encore et encore, avec la même ferveur que les premières années où son stylo râpait le papier pour y ébaucher sa soif de lui, de sa présence. Cette émotion, qu’il avait suscitée quinze ans auparavant, avait détruit sans ménagement son système de défense immunitaire bien établi pourtant à l’encontre du sentiment amoureux et constitué principalement de fierté, de ...
    ... famille et de religion.
    
    Et elle ne se lassait pas d’en décortiquer l’influence présente à chaque instant de sa vie.
    
    Justement, c’était de ces instants qu’elle aurait dû partager avec lui et dont elle avait tant de difficultés à lui transmettre. De ses longues rêveries de lui qui l’amenaient dans certains cas à quelques moments cocasses, elle estimait dans sa pudeur de femme qu’il n’était pas prêt à en entendre le récit. Cela l’aurait contrainte à révéler cette part obscure d’elle-même qu’elle mettait tant d’ardeur à dissimuler et qui pourtant la faisant vivre et qui l’appelait comme une libération de ses sens.
    
    Il lui était arrivé un matin de printemps (tellement rare sur Paris qu’il méritait d’être mentionné), une chose bien étrange. Ce devait être la première fois que ses rêves éveillés prenaient le pas sur le monde qui l’entourait. Elle se rendait chez son comptable pour le bilan annuel de sa société. Comme d’habitude, elle se gara sur un emplacement matérialisé pour les livraisons pour ne pas perdre de temps et, dans son culot inouï, pria le Dieu des pervenches pour qu’elles restent profiter du soleil aux terrasses de bistros.
    
    Elle s’installa dans le bureau, le comptable la fit patienter. C’était un jeune homme d’environ 28 ans qui vint s’occuper de son bilan. Elle ne l’avait jamais vu. Il se présenta et partit lui chercher un café, puis s’installa pour lui détailler son travail sur son entreprise. Et là, elle le regarda. Ses yeux bruns bordés de cils fins et ...
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