La couleur des extrêmes - Histoires de Sexe

La couleur des extrêmes

... des éléments !

Interloqués, Augustus et Arbogast fixent la donzelle avec stupeur !

— Un des TROIS éléments, conclut Sylvette, un de vos trois grades !

Bondissant sur ses pieds, le révérend administre une franche bourrade à son vis-à-vis :

— Mais c’est qu’elle fichtrement futée ta mie ! Il se pourrait bien qu’elle ait raison !
— L’idée est intéressante, approuve Arbogast, tout fier de la sagacité de sa compagne. Reste à comprendre ce verger…

Les deux hommes se congratulent joyeusement, oubliant presque la ravaudeuse qui en profite pour s’asseoir sur le plateau de la table. Ainsi perchée, la jeune femme profite de ce que le moine lui tourne le dos pour entrouvrir un instant son manteau et dévoile sa totale nudité à son amant qui en rougit instantanément. Elle attend ensuite tranquillement une accalmie dans les intempestives exclamations du moine pour glisser finement :

— Votre verger, dites-moi, ce ne serait plutôt le JARDIN des… Espéri… nes ?
— Hespéri-des, corrigent en chœur les deux hommes d’un véritable rugissement !
— Le Jardin des Hespérides, répète le moine, cette fois totalement interloqué en fixant, ahuri, la donzelle.

Interloqué et vexé de n’y avoir pas pensé lui-même ! Interloqué et inquiet : mais qui est donc vraiment cette gueuse pour connaître les filles d’Atlas et de Héra ? Quelle malice cache donc cette étrangère ? Est-elle bien ce qu’elle voudrait que l’on croie ? D’où lui vient cette connaissance de l’histoire antique ?

Décelant ...

... l’inquiétude et le soupçon dans les yeux du moine, Sylvette s’empresse d’expliquer :

— C’est là une légende de ma Provence, que l’on conte aux enfants : la légende du Jardin des Pommes d’Or. Du moins, c’est sous ce nom que je la connaissais jusqu’à ce qu’un missionnaire cathare m’explique qu’il s’agissait en fait de l’histoire du jardin des espéri… Deuh !
— Cathare ! reprend le moine, de plus en plus inquiet. Frayerais-tu avec ce genre d’engeance ?

Sylvette balaye la remarque d’un geste de la main :

— Que nenni, j’aime trop la Bonne Mère ! Mais pour en revenir à la légende, il y aurait donc de l’or au bout de votre chemin de piste…
— De l’or ! Un trésor ! Voilà qui expliquerait bien des choses, approuve Augustus tout excité. Peti… pardon, jeune fille, tu es phénoménale ! Tu es sûre de n’avoir rien d’autre à nous dire ?

Tout à son triomphe, Sylvette se dandine d’aise sur sa table, minaude et se fait désirer. L’air de rien, la voilà qui murmure :

— Il y a bien quelque chose… Je viens de penser…
— Parle coquine, intime le moine.
— Ben voilà ! Pour notre assassin, et si… s’il ne s’était pas enfui APRÈS son forfait, mais bien plus tard ?
— Après la découverte du cadavre ? Non, là, pauvrette, c’est impossible ! La chambre a été fouillée de fond en comble ! Braunstein a même sondé les murs à la recherche d’une cache ou d’un passage secret !
— De fond en… COMBLES, insiste la jeune femme.

Combles ? Augustus en reste interdit ! Le plafond ! Le plafond à caissons ! ...