1. La dernière séance


    Datte: 15/02/2019, Catégories: fh, hplusag, inconnu, cinéma, Voyeur / Exhib / Nudisme pénétratio, occasion, lieuxpubl, Auteur: Sixahuit, Source: Revebebe

    Sale temps, depuis quelques jours. Les rues grises et sans âme sont figées dans un froid glacial qui s’éternise, quand elles ne sont pas battues par un vent cinglant. Ce sont les vacances de Pâques et elle se morfond un peu plus chaque jour, calfeutrée dans son studio où elle feuillète d’un œil morne des magazines en attendant des jours meilleurs. Elle semble prostrée et pourtant son esprit est peuplé de désirs obscurs. C’est toujours ainsi lorsqu’elle est livrée à elle-même. Un étrange contraste entre son corps paresseux et ses échappées imaginaires et décousues. D’ordinaire si raisonnable, elle redoute à chaque fois ces digressions.
    
    Ce soir, elle a décidé de se prendre en main, de voir un peu de lumière. Elle ira se payer une toile à la dernière séance, faute de mieux. Toute seule. Vu son état, sa propre compagnie lui suffit amplement. Ses cheveux sont ébouriffés mais elle n’a pas envie de s’apprêter. De toute façon, ça n’a aucune importance : même vêtue d’un sac à patates, elle sait qu’elle damnerait un saint. Ça tient à son allure mi-ange mi-démon, sans doute. Elle enfile pêle-mêle ce qui lui tombe sous la main : un gilet de laine et une jupe en velours sous un épais anorak qui ne craindrait pas le froid polaire. Un dernier coup d’œil dans la glace, une mèche balayée du doigt, le col ajusté et c’est parti.
    
    Elle a pris un billet pour la première salle et ne se souvient même plus du titre du film quand elle s’assoit. Instinctivement, elle s’est mise au dernier ...
    ... rang, à l’extrémité de la travée contre le mur, là où c’est le plus sombre. La salle est immense et il n’y a presque personne. Elle se sent bien, à l’abri des regards. Elle laisse passer les pubs et les bandes-annonces.« À quoi ça rime, tout ça ? » se dit-elle. Les gens vivent par procuration. Pourquoi ne font-ils pas eux-mêmes ce qu’ils ont envie de faire ? Elle s’occupe à compter les spectateurs. Quelques couples et quelques célibataires devant elle. À l’autre extrémité de la travée, à droite, la silhouette affalée d’un homme qui semble d’un âge mûr. Elle ne l’avait pas vu mais il ne la gêne pas, il est assez loin d’elle. Pour une jeune femme de vingt-cinq ans, un homme qui en paraît quarante est forcément un homme mûr. Les types de son âge, elle les fréquente par la force des choses, à la Fac. Souvent, elle les trouve aussi fades que prétentieux, dépourvus d’originalité. Des copiés-collés, en somme. Et question sexe, l’imagination est rarement au pouvoir. Disons une fois sur cinq. Elle n’est pas une Marie-couche-toi-là, mais elle a suffisamment d’expérience pour en tirer cette conclusion.
    
    Elle ôte son anorak discrètement, comme si elle voulait passer inaperçue. Le film va bientôt commencer et elle pressent que ça ne va pas la captiver. Un coup d’œil furtif à droite. Le type d’âge mûr est accoudé, le menton sur la main, et lui aussi semble avoir échoué là pour tuer le temps. Ça la fait sourire.« Parfois, on ne regarde pas dans la bonne direction », songe-t-elle avec ...
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